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que tems, le tout fermente ; l’eau s’échauffe & bouillonne, s’épaissit & devient d’une couleur de bleu, tirant sur le violet ; la plante déposant tous ses sels, selon les uns, & toute sa subsistance selon les autres. Pour lors on ouvre les robinets de la trempoire, & l’on en fait sortir l’eau chargée de toute cette substance colorante de la plante, dans la seconde cuve appellée la batterie, parce qu’on y bat cette eau avec un moulin à palettes, pour condenser la substance de l’indigo, & la précipiter au fond, ensorte que l’eau redevient limpide & sans couleur, comme de l’eau commune. On ouvre les robinets de cette cuve pour en faire écouler l’eau jusqu’à la superficie de la fécule bleue : après quoi on ouvre d’autres robinets qui sont plus bas, afin que la fécule tombe au fond de la troisieme cuve, appellée reposoir, parce que c’est-là où l’indigo se repose & se désseche. On l’en tire pour former des pains, des tablettes.

L’on trouve à la côte de Coromandel & à Pondichéry deux sortes d’indigo, l’une beaucoup plus belle que l’autre ; il y en a encore plusieurs autres sortes qui augmentent de prix selon leur qualité. L’indigo de Java, ou indigo de Javan, est le meilleur de tous ; c’est aussi le plus cher, & par conséquent il y a peu de teinturiers qui l’employent. Le bon indigo doit être si léger, qu’il flotte sur l’eau : plus il enfonce, plus il est suspect d’un mélange de terre, de cendre ou d’ardoise pilée. Sa couleur doit être d’un bleu foncé, tirant sur le violet, brillant, vif, & pour ainsi dire éclatant. Il doit être plus beau dedans que dehors, & paroître luisant & comme argenté. Il faut en dissoudre un morceau dans un verre d’eau pour l’éprouver. S’il est pur & bien préparé, il se dissoudra entierement ; s’il est falsifié, la matiere étrangere se précipitera au fond du vaisseau. Le bon indigo brûle entierement ; & s’il est falsifié, ce qu’il y a d’étrangers reste après que l’indigo est consumé.

Limaille de fer ou de cuivre, ingrédient non colorant prohibé dans le grand & petit teint.

Huile d’olive utile à la teinture du noir.

Malerbe, plante d’une odeur forte dans son emploi ; ingrédient colorant qui croît dans le Languedoc & dans la Provence, affecté au bon & grand teint.

Moulée des Taillandiers & Emouleurs, ingrédient servant au noir prohibé aujourd’hui.

Orcanette prohibé.

Orseille, ingrédient affecté au petit teint, dont la composition est d’une espece de mousse appellée perelle ; de la chaux vive & de l’urine qu’on fait fermenter, en l’humectant & remuant de tems en tems, jusqu’à ce qu’elle soit devenue rouge. Il y a de l’orseille d’herbe ou des Canaries, qui est beaucoup meilleure que l’orseille faite avec de la perelle. Elle est composée de même.

Pastel, ingrédient colorant pour le bleu, affecté au bon & grand teint. Le pastel vient d’une graine qu’on seme toutes les années en Languedoc ; le meilleur est celui qui croît dans le diocèse d’Alby ; sa feuille est semblable à celle du plantain. On le seme ordinairement au commencement de Mars, & il s’en fait quatre recoltes, quelquefois cinq ; il s’en est fait jusqu’à six, mais il faut pour cela des belles saisons, & la sixieme recolte ne sert qu’à gâter celui des précédentes, si elles sont mêlées ensemble.

Quoique la premiere recolte du pastel semble devoir être meilleure que la seconde, & ainsi des autres ; néanmoins le contraire arrive, lorsque le printems se trouve humide ou pluvieux, & que les autres saisons se trouvent plus tempérées & plus seches ; la trop grande humidité, en rendant la feuille du pastel plus grande & plus grasse, en diminue aussi la force & la substance.

Le pastel ne doit être cueilli que lorsqu’il est bien

mûr. On doit laisser flétrir la feuille quelque tems après qu’elle est ramassée ; après quoi on la met sous la roue pour la faire piler, ce qui n’est que pour la mûrir davantage & lui faire perdre une partie de son suc huileux qui pourroit nuire à sa bonté ; après qu’il est moulu, on le laisse huit ou dix jours en pile, ayant soin de boucher les fentes & crevasses qui s’y font journellement, pour le laisser égoutter du reste de cette humeur superflue.

Après que le pastel est égoutté, on en fait de petites boules qu’on appelle cors ou coraignes qu’on met secher à l’ombre sur des claies qui sont mises exprès ; on les retire ensuite pour les garder en magasin jusqu’à ce qu’on veuille les piler ou mettre en poudre, ce qui se fait ordinairement au mois de Janvier, de Février ou de Mars.

Le pastel étant rompu avec des masses de bois, on le mouille avec de l’eau la plus croupie, pourvu qu’elle ne soit pas infectée, sale ou graisseuse, étant toujours la meilleure ; & après l’avoir bien mouillé & mêlé pour lui faire prendre également son eau, on le remue de tems en tems pendant quatre mois, du-moins trente-six fois, même jusqu’à quarante, afin qu’il ne s’échauffe & qu’il prenne également son eau par-tout ; après quoi il est en état d’être emballé & employé dans la teinture, quoiqu’il soit meilleur d’attendre qu’il soit plus vieux avant de l’employer ; le bon pastel augmentant toujours de force & de substance pendant six, sept, même jusqu’à dix ans, s’il est du meilleur.

Pastel d’écarlate, voyez Alkermès.

Potasse, ingrédient non-colorant, c’est le sel ou le fiel du verre, qui est une écume séparée de dessus la matiere du verre avant qu’elle se vitrifie.

La potasse pour la teinture est une espece de cendre gravelée qui se tire de Pologne & de Moscovie, ingrédient non-colorant.

Le raucou, ingrédient colorant affecté au petit teint, est une espece de pâte seche qui vient de l’Amérique. Cette matiere donne une couleur orangée à-peu-près comme le fustet ; & la teinture n’en est pas plus solide, parce que l’air l’emporte & l’efface.

Rodoul & le fovie, ingrédiens colorans, sont des feuilles de petits arbrisseaux qui ne se cultivent pas, affectés au petit teint pour le noir.

Safran, appellé safrano par les teinturiers de soie, ingrédient colorant qui n’entre point dans la teinture de laine, se tire du Levant & de l’Italie. On en cueille aussi en France, mais il n’est pas aussi bon que celui qu’on tire de l’étranger : il produit sur la soie le même effet que la cochenille sur la laine, à l’aide du jus de citron.

Le safranbourg ou safran bâtard, se trouve en Alsace & en Provence, ingrédiens pour le petit teint.

Salpêtre, ingrédient non-colorant affecté au bon teint, connu de tout le monde.

Santal, arbre qui croît dans les montagnes de Candie, dont le bois est rouge & dur.

Sarette, plante colorante, qui vient naturellement : elle est affectée au bon teint.

Savon blanc & noir, composition très-connue.

Sel ammoniac, sel commun, sel de tartre, sel gemme, sel minéral, sel nitre, voyez Chimie, extraits des minéraux, tous ingrédiens non-colorans.

Soude ; la meilleure soude se tire d’Alicante ; c’est un alkali des plus forts. C’est une plante qui croît aux bords de la mer dans des pays chauds, qui contient beaucoup de sel. Les Espagnols la font calciner dans des trous faits exprès dans la terre ; ce qui produit une cendre, dont les parties s’unissent si fort, qu’il s’en forme de petites pierres qu’il faut casser avec le marteau pour en faire usage.

Soufre, trop connu pour en faire la description ;