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sur les deux systèmes, & pour établir le mouvement de la terre. Voyez Révolution.

6°. Ou-bien les corps célestes tournent tous autour de la terre en 24 heures, ou-bien il faut que la terre tourne dans le même tems autour de son axe ; or les planetes qui tournent autour du soleil font leur révolution en plus ou moins de tems, suivant que leurs orbites sont plus ou moins grandes, c’est-à-dire, suivant qu’elles sont plus ou moins éloignées du soleil ; d’où il s’ensuit que si les étoiles & les planetes tournoient autour de la terre, elles feroient de même leur révolution en des tems inégaux, suivant que leurs orbites ou leurs distances seroient plus ou moins grandes ; au-moins seroit-il vrai que les étoiles fixes qui sont à des distances si prodigieuses de la terre, ne sauroient se mouvoir autour d’elle en 24 heures, comme on suppose que les font les planetes les plus voisines.

7°. Dans tous les ouvrages de la nature qui sont soumis à notre connoissance, le créateur paroît agir par les moyens les plus courts, les plus aisés & les plus simples ; or, si la terre paroît être en repos, & les étoiles se meuvent, la vîtesse des étoiles devra être immense, au-lieu qu’il ne faudroit, pour expliquer ces mêmes effets, que supposer à la terre un mouvement plus modéré.

En effet, la moyenne distance de la lune à la terre est de 57 demi-diametres de la terre ; ce qui, supposant le demi-diametre de la terre de 3440 milles géographiques, se monte à 196080 milles ; la circonférence du cercle diurne de la lune est donc de 1231380 milles, & par conséquent son mouvement horaire de 483308 milles ; de sorte que dans chaque seconde (espece de tems moindre que celui qui est employé à chaque battement d’artere), la lune, quoique le plus lent de tous les corps célestes, parcourt 3 milles & , c’est-à-dire plus d’une lieue & demie. Voyez Lune. De-plus la moyenne distance du soleil à la terre est de 22000 demi-diametres de la terre, ou de 75680000 milles géographiques ; d’où il s’ensuit que le mouvement diurne du soleil, lorsqu’il est dans l’équateur, devroit être de 475270400 milles, & que par conséquent dans l’espace d’une seconde il devroit parcourir 5480 milles géographiques, ou plus de 2000 lieues ; de-plus, la distance du soleil à la terre est à celle du soleil à Mars, comme 1 est à 2 ; à celle du soleil à Jupiter, comme un est à 5 &  ; ; & à celle du soleil à Saturne, comme 1 est à 9 : ainsi puisque les espaces diurnes, & tous les autres espaces semblables décrits dans un même tems, devroient être entr’eux comme ces distances ; Mars devroit donc dans un clin-d’œil décrire 8222 milles, Jupiter 28688 milles, & Saturne 520652 milles, c’est-à-dire environ 20000 lieues : enfin, les étoiles fixes étant bien plus éloignées de la terre que Saturne, leur mouvement dans l’équateur ou auprès de l’équateur, devra donc être par cette raison beaucoup plus prompt que celui de cette planete.

8°. Si la terre est en repos, & que les étoiles se meuvent d’un mouvement commun, les différentes planetes décriront chaque jour différentes spirales qui s’éloigneront jusqu’à un certain terme vers le nord, & retourneront ensuite vers le terme opposé du côté du sud dans des limites tantôt plus & tantôt moins étroites.

Car les différences des distances des planetes au zénith varient chaque jour, & elles augmentent jusqu’à un certain point vers le nord, & décroissant ensuite vers le sud ; ainsi puisqu’on trouve en même tems la hauteur du pole toujours la même, & que les planetes ne retournent pas au même point du méridien, on doit conclure de-là qu’elles décriront non pas des cercles, mais des spirales ; à quoi il faut ajouter que comme les différentes planetes ne conservent pas

toujours la même distance de la terre, mais qu’elles s’en approchent quelquefois, & que d’autres fois elles s’en éloignent, elles décrivent donc de plus grandes spirales à de plus grandes distances, & de plus petites spirales à de plus petites distances : de plus, puisque leur mouvement devient plus lent lorsque la planete est plus éloignée de la terre, il s’ensuit de-là que les plus grandes spirales devront être décrites en moins de tems que les plus petites ; or, toute cette complication de mouvemens en spirale peut-elle être admise, lorsqu’on a un moyen si simple d’y suppléer, en admettant le mouvement de la terre ?

9°. On trouve que la force de la gravité décroît à mesure qu’on approche de l’équateur, & cela arrive dans tous les corps qui ont un mouvement sur leur axe ; & dans ceux-là seulement, parce que c’est en effet le résultat nécessaire d’un pareil mouvement. Voyez Gravité & Figure de la terre.

En effet, lorsqu’un corps tourne sur son axe, toutes les parties, ou tous les corps qui lui appartiennent, font un effort continuel pour s’éloigner du centre ; ainsi l’équateur étant un grand cercle, & les paralleles allant toujours en diminuant vers les poles, c’est dans l’équateur que la force centrifuge est la plus grande, & elle décroît vers les poles en raison des diametres des paralleles, à celui de l’équateur. Or la force de la gravité détermine les différentes parties vers le centre du système total ; & par conséquent la force centrifuge qui agit en sens contraire de la force de la gravité, retarde la descente des graves, & elle la retarde d’autant plus qu’elle est plus grande. Le docteur Keiff prouve par le calcul que la force de la gravité est à la force centrifuge vers l’équateur, comme 289 est à 1, & que par conséquent les corps qui s’y trouvent y perdent , partie du poids qu’ils auroient si la terre étoit en repos. La force centrifuge étant donc extrèmement petite vers les poles, les corps qui ne pesent à l’équateur que 288 liv. peseront aux poles 289 livres ; or, on a remarqué en effet que la pesanteur est moindre à l’équateur qu’aux poles. La terre tourne donc sur son axe.

10°. Voici une démonstration du mouvement de la terre tirée des causes physiques, nous en sommes redevables aux découvertes de M. Newton ; & le docteur Keiff la regarde comme très-concluante, & même sans replique.

Il est démontré que toutes les planetes gravitent sur le soleil, & toutes les expériences confirment que le mouvement soit de la terre autour du soleil, soit du soleil autour de la terre, se fait de maniere que les aires décrites par les rayons recteurs de celui de ces deux corps qui est mobile, sont égaux en tems égaux, ou sont proportionnels au tems ; mais il est démontré aussi que lorsque deux corps tournent l’un autour de l’autre, & que leurs mouvemens sont réglés par une pareille loi, l’un doit nécessairement graviter sur l’autre. Or si le soleil gravite dans son mouvement sur la terre, comme l’action & la réaction sont d’ailleurs égales & contraires, la terre devra donc pareillement graviter sur le soleil. De plus, le même auteur a démontré que lorsque deux corps gravitent l’un sur l’autre, sans s’approcher directement l’un de l’autre en ligne droite, il faut qu’ils tournent l’un & l’autre sans s’approcher directement l’un de l’autre en ligne droite, il faut qu’ils tournent l’un & l’autre autour de leur centre commun de gravité. Le soleil & la terre tournent donc autour de leur centre commun de gravité ; mais le soleil est un corps si grand par rapport à la terre, laquelle n’est, pour ainsi-dire, qu’un point par rapport à lui, que le centre commun de gravité de ces deux corps, doit se trouver dans le soleil même, & peu loin de son centre ; la terre tourne donc autour d’un point qui est situé dans le