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Ibi cursu, luctando, hasta, disco, pugilatu, pila,
Saliendo, sese exercebant magis quam scorto aut saviis.

C’étoit une des fins qu’on s’étoit proposées dans l’établissement des thermes. Par ces exercices, on augmentoit la force des jeunes gens, on leur donnoit de l’adresse, & on les instruisoit dans les Sciences. Une autre vûe que l’on avoit eue, c’étoit la conservation de la santé, & peut-être la volupté y entra-t-elle aussi pour quelque chose. J’ai déja dit qu’il y avoit des thermes où l’on entroit librement, & sans qu’il en coutât rien, & que dans d’autres il falloit payer ; du reste, la somme que l’on donnoit étoit modique ; on étoit quitte pour la plus petite piece de monnoie, comme Juvenal le remarque dans la sixieme satyre.

Cædere sylvano porcum, & quadrante lavari.

Cette piece pourtant ne suffisoit pas lorsqu’on venoit trop tard, c’est-à-dire après les dix heures ; il falloit alors payer, selon le caprice des personnes préposées pour le service des thermes. Martial, l. X. epist. 70. a fait allusion à cette sorte d’exaction, quand il a dit :

Balnea post decimam lasso, centumque petuntur
Quadrantes, &c.

Les édiles avoient inspection sur les thermes, & sous eux étoient plusieurs ministres inférieurs, de sorte que l’ordre y régnoit, malgré l’entiere liberté que l’on y trouvoit. Il n’y avoit aucune distinction pour les places ; le peuple, comme la noblesse ; l’artisan, comme le magistrat, avoit droit de choisir parmi les places vuides, celle qui étoit le plus à son gré.

Ordinairement les thermes n’étoient point communs aux hommes & aux femmes ; ce ne fut que sous quelques empereurs corrompus que cette indécence eut lieu. Les endroits où les hommes se baignoient, furent presque toujours séparés des lieux destinés aux bains des femmes ; & même pour mettre encore mieux à couvert l’honneur de celles-ci, Agrippine, mere de Néron, fit ouvrir un bain destiné uniquement à l’usage des femmes ; exemple qui fut imité par quelques autres dames romaines, comme nous l’apprend Publius-Victor. On lit dans Spartien, que l’empereur Adrien ordonna que les bains des femmes seroient séparés des bains des hommes.

Le signal pour venir aux bains & pour en sortir, se donnoit au son d’une cloche ; si l’on s’y rendoit un peu tard, on couroit risque de n’avoir que de l’eau froide pour se baigner c’est ce que signifient ces deux vers de Martial, liv. XIV. epig. 163.

Redde pilam : sonat æs thermarum ; ludere pergis ?
Virgine vis solâ, lotas abire domum.

L’heure pour entrer dans les thermes, étoit, selon Pline, liv. III. c. j. la huitieme heure du jour en été, & la neuvieme en hiver. Martial, liv. IV. épig. 8. semble dire la même chose dans ces vers.

Sufficit in nonam nitidis octava palæstris.

Spartien, in Adriano, nous apprend que l’empereur Adrien défendit qu’on se mît dans le bain en public avant la huitieme heure. La plûpart ne se baignoient qu’une fois par jour ; quelques-uns néanmoins, plus adonnés aux exercices qui s’y faisoient, y retournoient jusqu’à sept fois dans un même jour. Galien de sanitate tuenda, liv. V. rapporte, qu’un certain philosophe nommé Primigène, étoit attaqué de la fievre le jour qu’il manquoit de se baigner.

L’usage des bains n’étoit interdit qu’à l’occasion d’un grand deuil ou d’une calamité publique, comme nous le voyons dans Tite-Live & dans Suétone.

Mais S. Clément d’Alexandrie, Pédag. l. III. c. v.

dit que les nobles faisoient porter aux bains des draps de toile très-fine, & des vases d’or & d’argent, sans nombre, tant pour servir aux bains, que pour le boire & le manger.

Ainsi le luxe s’introduisit dans un usage que le manque de linge, la chaleur du climat, & la nécessité de la propreté avoient fait naître. Les empereurs romains se prêterent aux besoins de la nation qu’ils gouvernoient, en bâtissant pour elle des thermes publics, plus grands ou plus magnifiques les uns que les autres. Tels furent ceux d’Auguste, de Néron, de Titus, de Trajan, de Commode, de Severe, d’Antonin, de Caracalla & de Dioclétien. Ces deux derniers surpasserent tous les autres par leur étendue. On ne peut voir les ruines des thermes de Caracalla, sans être surpris de l’immensité qu’avoit ce bâtiment ; mais il n’y en eut point de plus somptueux, plus chargés d’ornemens & d’incrustations, ni qui fit plus d’honneur à un prince, que les thermes de Dioclétien. Une seule salle de ces édifices fait aujourd’hui l’église des Chartreux à Rome ; une des loges du portier fait l’église des Feuillans. (Le chevalier de Jaucourt.

Thermes des nymphes, (Littérat.) les Poëtes peuploient tous les élémens de dieux, de déesses, de nymphes ; & la plus petite fontaine avoit sa divinité comme le plus grand fleuve. Les bains connus dans l’histoire, sont également fameux dans la fable. Si l’on en croit Diodore, les anciennes traditions portoient qu’Hercule revenant d’Espagne, & amenant les bœufs de Géryon, passa par la Sicile ; là s’étant arrêté près d’Himere, Minerve ordonna aux Nymphes de faire sortir de terre des bains où ce héros pût se délasser ; & les Nymphes obéirent. C’est peut-être pour cette raison que Pindare les nomme simplement les bains des Nymphes. Cet événement fabuleux a trouvé place sur les médailles. Nous en avons une représentant Hercule, & au revers trois nymphes qui font sortir de terre les bains d’Himère. L’autre médaille figure un char attelé de deux chevaux, monté par un homme que l’on croit être Ergoteles ; cet homme tient les renes de la main droite, & de la gauche une espece de bâton avec une victoire au-dessus ; au revers est une nymphe tenant une patere élevée sur un brasier. Derriere la nymphe est Hercule dans le bain, sur les épaules duquel un lion accroupi verse de l’eau. (D. J.)

THERMESIA, (Mytholog.) il y avoit dans le territoire de Corinthe, un temple de Cérès Thermesia, ainsi nommée parce que le culte qu’on y rendoit à la déesse avoit été apporté de Thermesse, île voisine de la Sicile, dont parle Strabon. (D. J.)

THERMIDA, (Géog. anc.) ville de l’Espagne tarragonoise, selon Ptolomée, l. II. c. vj. qui la donne aux Carpetains. Quelques savans croient que c’est aujourd’hui Rajas, village d’Espagne dans la nouvelle Castille, entre Madrid & Siguença. (D. J.)

THERMIE, l’île, (Géog. anc. & mod.) ou l’île Thermia ; île de l’Archipel, l’une des Cyclades, entre l’île de Zia au nord, & l’île de Serpho au midi ; elle est à quarante milles de Syra ou Syros, & à trente-six du port de Zia, mais seulement à douze milles de ce dernier port en droiture.

Le voisinage de ces deux îles ne permet pas de douter que Thermie ne soit l’île de Cytnos, dont les anciens estimoient tant les fromages, puisque Dicéarque dans sa Description de la Grece, la place entre Céos & Sériphus. Il en sortit un grand peintre que Eustathe appelle Cydias. C’est encore dans cette île que fut rejetté par la tempête, le faux Néron esclave, grand joueur du luth & grand musicien, accompagné d’une troupe de gens de sa sorte, armés & soulevés, comme Tacite, Hist. l. II. c. viij. nous l’apprend.