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U, Subst. masc. (Gram.) c’est la vingtieme lettre de l’alphabet latin ; elle avoit chez les Romains deux différentes significations, & étoit quelquefois voyelle, & quelquefois consonne.

I. La lettre U étoit voyelle, & alors elle représentoit le son ou, tel que nous le faisons entendre dans fou, loup, nous, vous, qui est un son simple, & qui, dans notre alphabet devroit avoir un caractere propre, plutôt que d’être représenté par la fausse diphtongue ou.

De-là vient que nous avons changé en ou la voyelle u de plusieurs mots que nous avons empruntés des Latins, peignant à la françoise la prononciation latine que nous avons conservée : sourd, de surdus ; court, de curtus ; couteau, de culter ; four, de furnus ; doux, de dulcis ; bouche, de bucca ; sous, & anciennement soub, de sub ; genou, de genu ; bouillir, & anciennement boullir, de bullire, &c.

II. La même lettre étoit encore consonne chez les Latins, & elle représentoit l’articulation sémilabiale foible, dont la forte est F ; le digamma I, que l’empereur Claude voulut introduire dans l’alphabet romain, pour être le signe non équivoque de cette articulation, est une preuve de l’analogie qu’il y avoit entre celle là & celle qui est représentée par F. (Voyez I.) Une autre preuve que cette articulation est en effet de l’ordre des labiales, c’est que l’on trouve quelquefois V pour B ; velli pour belli ; Danuvius, pour Danubius.

En prenant l’alphabet latin, nos peres n’y trouverent que la lettre U pour voyelle & pour consonne ; & cette équivoque a subsisté long-tems dans notre écriture : la révolution qui a amené la distinction entre la voyelle U ou u, & la consonne V ou v, est si peu ancienne, que nos dictionnaires mettent encore ensemble les mots qui commencent par U & par V, ou dont la différence commence par l’une de ces deux lettres ; ainsi l’on trouve de suite dans nos vocabulaires, utilité, vue, uvée, vuide, ou bien augment avant le mot avide ; celui-ci avant aulique, aulique avant le mot avocat, &c. C’est un reste d’abus dont je me suis déjà plaint en parlant de la lettre I, & contre lequel je me déclare ici, autant qu’il est possible, en traitant séparément de la voyelle U, & de la consonne V.

U, s. m. c’est la vingt-uniéme lettre de l’alphabet françois, & la cinquieme voyelle. La valeur propre de ce caractere est de représenter ce son sourd & constant qui exige le rapprochement des lévres & leur projection en-dehors, & que les Grecs appelloient upsilon.

Communément nous ne représentons en françois le son u que par cette voyelle, excepté dans quelques mots, comme j’ai eu, tu eus, que vous eussiez, ils eurent, Eustache : heureux se prononçoit hureux il n’y a pas long-tems, puisque l’abbé Régnier & le pere Buffier le disent expressément dans leurs grammaires françoises ; & le dictionnaire de l’académie françoise l’a indiqué de même dans ses premieres éditions : l’usage présent est de prononcer le même son dans les deux syllabes heu-reux.

Nous employons quelquefois u sans le prononcer après les consonnes c & g, quand nous voulons leur donner une valeur gutturale ; comme dans cueuillir, que plusieurs écrivent cueillir, & que tout le monde prononce keuillir ; figue, prodigue, qui se prononcent

bien autrement que fige, prodige, par la seule raison de l’u, qui du reste est absolument muet.

Il est aussi presque toujours muet après la lettre q ; comme dans qualité, querelle, marqué, marquis, quolibet, queue, &c. que l’on prononce kalité, kerelle, marké, markis, kolibet, keue.

Dans quelques mots qui nous viennent du latin, u est le signe du son que nous représentons ailleurs par ou ; comme dans équateur, aquatique, quadrature, quadragésime, que l’on prononce ékouateur, akouatike, kouadrature, kouadragésime, conformément à la prononciation que nous donnons aux mots latins æquator, aqua, quadrum, quadragesimus. Cependant lorsque la voyelle i vient après qu, l’u reprend sa valeur naturelle dans les mots de pareille origine, & nous disons, par exemple,kuinkouagésime pour quinquagésime, de même que nous disons kuinkouagesimus pour quinquagesimus.

La lettre u est encore muette dans vuide & ses composés, où l’on prononce vide : hors ces mots, elle fait diphtongue avec l’i qui suit, comme dans lui, cuit, muid, &c.

V, s. m. c’est la vingt-deuxieme lettre, & la dix-septieme consonne de notre alphabet. Elle représente, comme je l’ai déjà dit, l’articulation sémilabiale foible, dont la forte est F ; (voyez F.) & de-là vient qu’elles se prennent aisément l’une pour l’autre : neuf devant un nom qui commence par une voyelle, se prononce neuv, & l’on dit neuv hommes, neuv articles, pour neuf hommes, neuf articles : les adjectifs terminés par f, changent f en ve pour le féminin ; bref, m. breve, f. vif, m. vive, f. veuf, m. veuve, f.

Déjà avertis par la Grammaire générale de P. R. de nommer les consonnes par l’e muet, nos peres n’en ont rien fait à l’égard de celle-ci quand l’usage s’en introduisit ; & on l’appelle plus communément , que ve.

Il paroît que c’étoit le principal caractere ancien pour représenter la voyelle & la consonne. Il servoit à la numération romaine, où V. vaut cinq ; IV. vaut cinq moins un, ou quatre ; VI, VII, VIII, valent cinq plus un, plus deux, plus trois, ou six, sept, huit : .

Celles de nos monnoies qui portent la lettre V simple, ont été frappées à Troyes : celles qui sont marquées du double W, viennent de Lille. (B. E. R. M.)

V, en Musique. Cette lettre majuscule sert à indiquer les parties de violons ; & quand elle est double V V, elle marque que le premier & le second dessus de symphonie sont à l’unisson. (S)

v, dans le commerce. Cette lettre suivie d’un petit ° & ainsi figurée V°. signifie verso. Cette même voyelle ou simple V ou W double barré par le haut, comme dans ces caracteres ou , signifie écu ou écus de soixante sols ou trois livres tournois. Dict. de commerce. Voyez Abréviation.

v, v, v, (Ecriture.) ces trois v dans leur figure sont composés d’une ligne mixte, & de la 5, 6, 7 & 8 partie d’o. Ils se forme du mouvement mixte des doigts & du poignet. Voyez le vol. des Pl. à la table de l’Ecriture.

U. u, u, quant à leur figure, sont deux i sans point liés ensemble, ils se forment du mouvement mixte des doigts & du poignet dans leurs parties inférieures & du simple mouvement des doigts dans leur premieres parties. Voyez le vol. des P l. à la table de l’Ecriture.

VA, s. m. (Jeu.) abréviation de vade ; ainsi on