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nes, & peut-être toutes, sont orientales. La netteté de la couleur suppose toûjours dans les pierres une pâte fine ; celle de la cornaline ne differe guere de la pâte de l’agate que par la couleur ; & il y a des cornalines dont le rouge, quoique vif, est si pâle, qu’on le reconnoît à peine ; il est délayé dans cette matiere blanche & laiteuse qui fait la pâte de l’agate, de la calcédoine, de la sardoine, & de la cornaline ; & lorsque la teinte de rouge est très-foible, il est difficile, & quelquefois impossible, de distinguer si elle est composée de rouge ou d’orangé ; & quelquefois la teinte n’est en effet ni rouge ni orangée ; de même que dans le spectre solaire il se trouve tel espace qui n’est ni rouge ni orangé, mais qui participe également au rouge & à l’orangé. Il y a donc telle pierre dont la teinte foible est équivoque entre le rouge de la cornaline & l’orangé de la sardoine : on ne sait si cette pierre est cornaline ou sardoine ; & réellement elle n’est ni l’une ni l’autre relativement à ces dénominations ; mais on pourroit dire qu’elle seroit l’une & l’autre, puisqu’elle a les caracteres spécifiques de la cornaline & de la sardoine à égal degré. Voyez Sardoine.

Ce défaut de la nomenclature est commun à tous les systèmes de distributions méthodiques en histoire naturelle, voyez Méthode ; aussi les Nomenclateurs sont rarement d’accord ensemble pour l’application des noms ; les uns donnent des noms différens à une même chose, les autres réunissent plusieurs choses différentes sous le même nom. Par exemple, la cornaline & la sardoine sont deux pierres différentes par la couleur, puisqu’il est certain que l’une est rouge & que l’autre est orangée ; & si on ne reconnoissoit pas la différence de couleur pour un caractere spécifique dans les pierres fines, on viendroit à confondre non-seulement la cornaline avec la sardoine, mais encore ces deux pierres avec l’agate & la calcedoine, car elles sont toutes de même pâte, & elles ne different les unes des autres, d’une maniere apparente, que par la couleur. Cependant M. Wallerius dans sa Minéralogie, fait de l’agate blanche, de l’agate ordinaire, de la calcedoine & de la corraline, quatre especes différentes, tandis qu’il confond la sardoine avec la cornaline dans une même espece sous les noms de carncolus, sardion, sarda, saraus. Il est évident que le premier appartient à la cornaline, & les trois autres à la sardoine ; mais cet auteur n’est pas le seul qui ait fait cette équivoque : la plûpart des nomenclateurs ont plus étudié les noms que les choses. Dans la distribution des noms on erre souvent lorsqu’on ne consulte que des descriptions incomplettes, telles que le sont le plus grand nombre de celles que nous avons en histoire naturelle ; & la multiplicité des noms pour une même chose, rend toûjours l’application de ces noms très-difficile & fort incertaine, même pour ceux qui connoissent parfaitement les choses. L’ouvrage de M. Wallerius étoit très-pénible & supposoit une grande érudition pour rassembler tous les noms synonymes que les anciens, & même les modernes, ont donné à chacun des minéraux en particulier. Ce travail sera très utile & épargnera bien des recherches aux Naturalistes ; mais nous en étions privés avant que M. le baron d’Holbach eût pris la peine de traduire de l’allemand en françois le livre de M. Wallerius, Minéralogie ou description générale des substances du regne minéral, &c. Paris, 1753. 2. vol. in-8o. M. d’Holbach a fait plus, il a ajouté les noms françois aux noms grecs, latins, &c. il faut s’être occupé des détails de l’histoire naturelle, pour connoître toute l’utilité de cette nomenclature françoise, & pour sentir toute la difficulté qu’il y avoit à l’établir. Il a fallu suppléer des noms qui manquoient dans notre langue, & déterminer la signification & les acceptions de ceux

dont on ne connoissoit que les sons. Ce travail ne peut être que le fruit d’une grande connoissance des minéraux, & d’un zele constant & éclairé pour l’avancement de la Minéralogie.

Cornaline onyce, cornaline aillée, cornaline herborisée. Les caracteres & les différences de ces especes de cornalines sont les mêmes que dans l’agate, en supposant le rouge vif & toutes ses nuances sur un fond blanc ou blanchâtre. La cornaline herborisée est plus belle & plus estimée que l’agate herborisée, parce que le rouge vif sur un fond blanc a plus d’éclat que le noir ; d’ailleurs les différentes teintes de rouge sont fort agréables dans les cornalines herborisées. Il arrive quelquefois que la matiere étrangere qui forme les ramifications, a plus d’épaisseur dans le tronc & dans le corps des tiges de ces especes de branchages qu’à leurs sommets, alors le degré de couleur est proportionné à l’épaisseur de la matiere colorante ; ainsi le tronc & le corps des tiges des ramifications est d’un rouge brun, & même tirant sur le noir, tandis que les sommets, c’est-à-dire les extrémités des rameaux sont d’une couleur roussâtre, & même d’un rouge vif. Les gens qui aiment le merveilleux s’imaginent reconnoître par cette différence de couleur au sommet des ramifications, les fleurs de la petite mousse ou de la petite plante qu’ils supposent être dans la pierre.

Les cornalines servent aux mêmes usages & se trouvent dans les mêmes endroits que les agates orientales. Voyez Agate, Pierres fines. (I)

* CORNARISTES, s. m. pl. (Hist. ecclés.) disciples de Theodore Cornhert, enthousiaste, hérétique & secrétaire des états de Hollande. On peut dire de cet homme, factus est sagittarius, & manus ejus contrà omnes : il sembloit que sa crainte fût de n’être pas persecuté. Il n’étoit d’accord avec aucun religionnaire. Il écrivoit & disputoit en même tems & contre les Catholiques, & contre les Luthériens, & contre les Calvinistes. Il prétendoit que toutes les communions avoient grand besoin d’une réforme ; mais il ajoûtoit que sans une mission soutenue par des miracles, personne n’étoit en droit de s’en mêler, les miracles étant les seules preuves à la portée de tout le monde qu’un homme annonce la vérité. Son avis étoit donc qu’en attendant l’homme aux miracles, on se réunît tous sous une forme d’interim ; qu’on lût aux peuples le texte de la parole de Dieu sans commentaire, & que chacun en pensât comme il lui conviendroit. Il croyoit qu’on pouvoit être bon Chrétien sans être membre d’aucune église visible ; aussi ne communiquoit-il avec personne, ce qui étoit fort conséquent dans un homme mécontent de tout le monde. Il se déclara un peu plus ouvertement contre le Calvinisme que contre aucune autre façon de penser. La protection du prince d’Orange mettant sa personne à couvert des violences auxquelles les sectaires qui l’environnoient se seroient portés volontiers, ils furent obligés de s’en tenir aux injures ; mais en revanche ils lui en dirent beaucoup, selon l’usage.

CORNE, s. f. (Hist. nat. des Insect.) pointe fine, dure, sans articulation, qui sort ordinairement de la tête des insectes.

La Nature a donné des cornes dures à quelques insectes, tout comme elle en a donné à divers quadrupedes. Ces cornes différent des antennes, en ce qu’elles n’ont point d’articulations. Plusieurs insectes n’ont qu’une corne qui est placée sur la tête & s’éleve directement en-haut, ou se recourbe en arriere comme une faucille. Nos Naturalistes en ont donné des figures : mais il y a aussi des insectes qui ont deux cornes placées au-devant de la tête, s’étendant vers les côtés, ou s’élevant en ligne droite. Ces cornes sont ou courtes, unies, & un peu recourbées en-dedans comme des faucilles, ou elles sont branchues