Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 5.djvu/482

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

n’eussent pas alors de jurisdiction sur les ecclésiastiques.

Comme l’aide établie par l’ordonnance du roi Jean, du 28 Décembre 1355, n’avoit lieu que dans le pays coûtumier, les états de la Languedoil accorderent de leur part au mois de Septembre 1356, une aide au roi ; & à cette occasion le dauphin Charles rendit encore une ordonnance au mois de Février suivant, portant que les états entretiendroient pendant un an 10000 hommes armés ; que pour l’entretien de ces troupes, chacun payeroit une certaine somme qui étoit une espece de capitation ; qu’en outre les sujets des prélats & des nobles, & les autres habitans qui auroient douze ans, & qui seroient aisés, payeroient un autre subside à proportion de leurs biens.

Que sur les sommes provenantes de ces impositions, la solde des gens de guerre leur seroit payée par quatre thrésoriers généraux choisis par les trois états, & que ces quatre thrésoriers généraux en nommeroient d’autres particuliers dans chaque sénéchaussée, pour lever les impositions.

Que le payement des gens de guerre seroit fait par les quatres thrésoriers généraux, sous les ordres de vingt-quatre personnes élues par les trois états, ou de plusieurs d’entr’eux ; que ces vingt-quatre élus seroient appellés au conseil du lieutenant du roi lorsqu’il le jugeroit à propos ; qu’eux seuls pourroient donner une décharge suffisante aux thrésoriers.

Que les trois états députeroient douze personnes, quatre de chaque ordre pour recevoir les comptes, tant des quatre thrésoriers généraux que des particuliers, & leur feroient prêter serment à eux & à leurs commis : que les thrésoriers généraux & particuliers ne rendroient compte à aucun officier du roi, quel qu’il fût, mais seulement aux douze députés des états qui feroient aussi passer en revûe les gendarmes & les autres troupes, & leur feroient prêter serment.

Telle fut l’origine des élus qui sont encore nommés dans les pays d’états ; mais dans ces pays il n’y a pas communément de tribunaux d’élections, excepté dans quelques-uns comme dans les généralités de Pau, Montauban & Bourgogne ; il y a aussi dans ces mêmes pays d’états des juges royaux qui connoissent des matieres d’élection, & dont l’appel en ces matieres ressortit aux cours des aydes chacune en droit soi.

Les trois états de la Languedoïl assemblés à Compiegne, ayant accordé au dauphin Charles une nouvelle aide en 1358, le dauphin fit encore une ordonnance le 14 Mai de ladite année, par laquelle il revoque toutes lettres & commissions par lui données sur le fait des subsides & aides du tems passé, tant aux généraux de Paris qu’aux élus particuliers par les diocèses & autrement ; que les prélats & autres gens d’église, nobles & gens des bonnes villes avoient élû & éliroient des personnes pour gouverner l’aide qui venoit d’être octroyée.

Il ordonne ensuite que les élus des pays (de la Languedoïl) pourroient quant aux gens autres que de sainte église, faire modération loyalement, de bonne foi, sans fraude, comme ils verroient être à faire ; & que quant aux gens d’église demeurant dans lesdits plats pays connus, & qui y auroient leurs bénefices, les prélats du lieu appellés, avec eux les élus & le receveur pourroient les modérer quant au dixieme desdits bénéfices, après avoir oüi lesdits élus & receveur.

Que certaines personnes, c’est-à-savoir une de chaque état, seroient élûs par les gens d’église, nobles & bonnes villes & commis de par le dauphin pour le fait desdites aydes ordonner & mettre sur & gouverner ès lieux où ils seroient des commis & receveurs qui recevroient les deniers de cette aide.

Que ces receveurs seroient ordonnés par les élus, par le conseil des bonnes gens du pays. Que les élus & receveurs feroient serment au roi ou à ses officiers, de bien & loyalement se comporter sur ce fait. Il n’est plus parlé en cet endroit de serment envers les états.

Les élus étoient alors au nombre de trois ; car le même article dit qu’ils ne pourroient rien faire de considérable sur ce fait l’un sans l’autre, mais tous les trois ensemble.

Ces élus avoient des gages & regloient ceux des receveurs : en effet l’article suivant porte que les autres aides du tems passé avoient été levées à grands frais & qu’elles avoient produit peu de chose à cause des grands & excessifs gages & salaires des élus particuliers, receveurs généraux à Paris. C’est pourquoi le dauphin ordonne que chacun des élus aura pour ses gages ou salaires 50 livres tournois pour l’année, & les receveurs au-dessous de ladite somme, selon ce que les élus regleroient par le conseil des bonnes gens du pays.

A l’occasion de cette aide le dauphin donna encore des lettres le même jour 14 Mai 1358, portant que dans l’assemblée des états de la Languedoil, Messire Sohier de Voisins, chevalier, avoit été élu de l’état des nobles pour ladite aide, mettre sus & gouverner en la ville & diocèse de Paris, excepté la partie de ce diocèse qui est de la prevôté & ressort de Meaux ; que pour l’état de l’église, ni pour les bonnes villes & plats pays aucuns n’avoient été élus pour la ville de Paris ; & en conséquence il mande au prevôt de Paris ou son lieutenant qu’ils fassent assembler à Paris les gens d’église & de la ville de Paris, & les contraindre de par le roi & le dauphin d’élire, savoir l’état de l’église, une bonne & suffisante personne ; & pour les gens de la ville de Paris & du pays, un bon & suffisant bourgeois, pour gouverner l’aide avec le susdit chevalier ; que si ces élus étoient refusans ou délayans de s’acquitter de ladite commission,ils y seroient contraints par le prevôt de Paris, savoir lesdits chevalier & bourgeois par prise de corps & biens, & celui qui seroit élu par l’église, par prise de son temporel ; que si lesdits gens d’église & bourgeois refusoient ou différoient de faire l’élection, le prevôt de Paris ou son lieutenant éliroit par bon conseil deux bonnes & suffisantes personnes à ce faire, c’est-à-savoir de chacun desdits états avec ledit chevalier. L’exécution de ces lettres ne fut pas adressée aux généraux des aides, attendu que par d’autres lettres du même jour toutes les commissions de ces généraux avoient été revoquées comme on l’a dit ci-devant.

Enfin il est dit que les élus feront l’inquisition & compte du nombre des feux des bonnes villes & cités, & par le conseil des maires des villes ou atournés, dans les lieux où il y en a, sinon des personnes les plus capables.

Le roi Jean ayant, par son ordonnance du 5 Décembre 1360, établi une nouvelle aide sur toutes les marchandises & denrées qui seroient vendues dans le pays de la Languedoïl ; le grand conseil fit une instruction pour la maniere de lever cette aide, & ordonna que pour gouverner l’aide en chaque cité, & pour le diocèse,il y auroit deux personnes notables, bonnes & suffisantes : ainsi le nombre des élus fut réduit à deux, au lieu de trois qu’ils étoient auparavant.

Il fut aussi ordonné que l’imposition de douze deniers pour livre sur toutes les marchandises & denrées, autres que le sel, le vin & les breuvages, seroit donnée à ferme. Les cautions prises & les deniers reçus de mois en mois par les élus & députés en chaque ville, pour toute la ville & diocese d’icelle, tant par eux que par leurs députés.