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dront un long délai pour faire réponse ; & il ordonne, non pas que les lettres mêmes, mais que la teneur (c’est-à-dire la substance) des lettres sera enregistrée en la chambre ; ce qui signifie en cet endroit que l’on fera mention de ces lettres sur le registre, & que l’on y expliquera au long les causes du refus.

La cour des aides qui tire son origine de ces généraux des aides, est pareillement en possession de vérifier & enregistrer toutes les ordonnances, édits, déclarations, & autres lettres qui lui sont adressées, & d’en envoyer des copies aux siéges de son ressort, pour y être lûes, publiées, & registrées.

L’ordonnance de Moulins & l’édit du mois de Janvier 1597, enjoignent aux cours de procéder incessamment à la vérification des ordonnances, toutes autres affaires cessantes. L’ordonnance de 1667 ajoûte même la visite & jugement des procès criminels, ou affaires particulieres des compagnies.

Mais comme il peut échapper à nos rois de signer des ordonnances dont ils n’auroient pas d’abord reconnu le défaut, ils ont plusieurs fois défendu eux-mêmes aux cours d’enregistrer aucunes lettres qui seroient scellées contre la disposition des ordonnances. Il y a entre autres des lettres de Charles VI. du 15 Mai 1403, pour la révocation des dons faits sur le domaine, qui font défenses aux gens des comptes & thrésoriers à Paris, présens & à venir, supposé qu’il fût scellé quelques lettres contraires à celles-ci, d’en passer ni vérifier aucunes, quelques mandemens qu’ils eussent du roi, soit de bouche, ou autrement, sans en avertir le roi ou la reine, les oncles & freres du roi, les autres princes du sang, & gens du conseil.

Charles IX. par son édit du mois d’Octobre 1562, pour la Bretagne, dit que si la cour trouvoit quelque difficulté en la vérification des édits, elle enverra promptement ses remontrances par écrit, ou députera gens pour les faire.

La même chose est encore portée dans plusieurs autres déclarations postérieures.

Le parlement & les autres cours ont dans tous les tems donné au roi des preuves de leur attachement, en s’opposant à la vérification des ordonnances, édits, & déclarations, qui étoient contraires aux véritables intérêts de S. M. ou au bien public ; & pour donner une idée de la fermeté du parlement dans ces occasions, il suffit de renvoyer à ce que le premier président de la Vacquerie répondit à Louis XI. comme on le peut voir dans Pasquier, en ses recherches, liv. VI. chap. xxxjv.

Lorsque les nouveaux réglemens adressés aux cours sont seulement susceptibles de quelque explication, les cours les enregistrent avec des modifications. On en trouve des exemples dès le tems du roi Jean, notamment à la fin de deux de ses ordonnances du mois d’Avril 1361, où il est dit qu’elles ont été vûes, corrigées, & lûes en parlement. La possession des cours à cet égard est constante, & leur droit a été reconnu en différentes occasions, notamment par un réglement du conseil du 16 Juin 1644.

Les particuliers ne peuvent pas former opposition à l’enregistrement des ordonnances, édits, & déclarations, ni des lettres patentes portant réglement général, mais seulement aux lettres qui ne concernent que l’intérêt de quelques corps ou particuliers.

Le procureur général du roi peut aussi s’opposer d’office à l’enregistrement des lettres patentes obtenues par des particuliers, ou par des corps & communautés, lorsque l’intérêt du roi ou celui du public s’y trouve compromis. On trouve dès 1390 une opposition de cette espece formée à l’enregistrement de lettres patentes, du mois de Juin de ladite année, à la requête du procureur-général du roi, lequel fit proposer ses raisons à la cour par l’avocat du roi ; il

fut plaidé sur son opposition, & l’affaire fut appointée. Le chapitre de Paris qui avoit obtenu ces lettres, se retira pardevers le roi, & en obtint d’autres, par lesquelles le roi enjoignit au parlement d’enregistrer les premieres. Le procureur-général du roi s’opposa encore à l’enregistrement de ces nouvelles lettres ; & lui & le chapitre ayant fait un accord sous le bon plaisir du parlement, & étant convenus de certaines modifications, le parlement enregistra les lettres à la charge des modifications.

Quoique les particuliers ne puissent pas former opposition à l’enregistrement des ordonnances, édits, déclarations, cette voie est néanmoins permise aux compagnies qui ont une forme publique, lorsque la loi que l’on propose paroît blesser leurs droits ou priviléges. Cela s’est vû plusieurs fois au parlement.

Pour ce qui est de la forme en laquelle se fait dans les cours l’enregistrement, c’est-à-dire l’inscription des nouveaux réglemens sur les registres, c’est une derniere opération qui est toûjours précédée de la lecture & vérification des réglemens ; elle étoit aussi autrefois précédée de leur publication, qui se faisoit à l’audience.

Il paroît que dès le tems de la seconde race, les comtes auxquels on envoyoit les nouveaux réglemens pour les faire publier dans leur siége, en gardoient l’expédition dans leur dépôt, pour y avoir recours au besoin ; mais il y avoit dès-lors un dépôt en chef dont tous les autres n’étoient qu’une émanation : ce dépôt étoit dans le palais du roi.

En effet Charles le Chauve ordonna en 803 que les capitulaires de son pere seroient derechef publiés ; que ceux qui n’en auroient pas de copie envoyeroient, selon l’usage, leur commissaire & un greffier, avec du parchemin, au palais du roi, pour en prendre copie sur les originaux qui seroient, dit-il, pour cet effet tirés de armario nostro ; c’est-à-dire du tresor des chartres de la couronne : ce qui fait connoître que l’on y mettoit alors l’original des ordonnances. C’est ce dépôt que S. Louis fit placer à côté de la sainte chapelle, où il est présentement, & dans lequel se trouve le registre de Philippe-Auguste, qui remonte plus haut que les registres du parlement, & contient plusieurs anciennes ordonnances de ce tems.

L’ancien manuscrit de la vie de S. Louis, que l’on conserve à la bibliotheque du Roi, fait mention que ce prince ayant fait plusieurs ordonnances, les fit enregistrer & publier au châtelet. C’est la premiere fois que l’on trouve ce terme, enregistrer, pour exprimer l’inscription qui se faisoit des reglemens entre les actes du tribunal ; ce qui vient de ce que jusqu’alors on n’usoit point en France de registres pour écrire les actes des tribunaux ; on les écrivoit sur des peaux, que l’on rouloit ensuite : & au lieu de dire les minutes & registres du tribunal, on disoit les rouleaux, rotula ; & lorsque l’on inscrivoit quelque chose sur ces rouleaux, cela s’appelloit inrotulare, comme il est dit dans deux ordonnances, l’une de Philippe-Auguste, de l’an 1218. art. 6. l’autre de Louis VIII. du mois de Novembre 1223. On trouve cependant au troisieme registre des olim, fol. 151 & 152, ensuite de deux arrêts, ces termes, ità registratum in rotulo istius parlamenti. Ainsi la mention que l’on faisoit d’un arrêt sur les rouleaux, s’appelloit aussi enregistrement.

Etienne Boileau, prévôt de Paris sous S. Louis, fut le premier qui fit écrire en cahiers ou registres, les actes de sa jurisdiction.

Jean de Montluc, greffier du parlement, fit de même un registre des arrêts de cette cour, qui commence en 1256 : cet usage fut continué par ses successeurs.

Le plus ancien registre de la chambre des comp-