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ou relativement à la consistance. Dans le premier cas on dit un livre épais, un bloc épais ; dans le second on dit des bataillons épais ; dans le troisieme on dit une encre épaisse, un vin épais, &c. Il se prend aussi au figuré, & l’on dit un homme épais, une machoire épaisse.

Un livre épais est celui qui contient un trop grand nombre de feuillets, eu égard à son format ; car un in-folio pourroit être trop mince avec le même nombre de feuillets qu’un in-douze trop épais : d’où l’on voit que le mot épais est un terme relatif. Le substantif d’épais est épaisseur. Si la dimension d’un corps qu’on aura appellée sa largeur, est parallele à l’horison, son épaisseur sera perpendiculaire à sa largeur.

Epais, adject. en Musique : genre épais ou dense, πυκνός ; est, selon la définition d’Aristoxene, celui où dans chaque tétracorde la somme des deux premiers intervalles est toûjours moindre que le troisieme : ainsi le genre enharmonique est épais, parce que les deux premiers intervalles, qui sont d’un quart de ton chacun, ne forment ensemble qu’un semi-ton ; somme beaucoup moindre que le troisieme intervalle, qui est une tierce majeure. Le genre chromatique est aussi un genre épais ; car ses deux premiers intervalles ne forment qu’un ton, moindre encore que la tierce mineure qui suit. Mais le genre diatonique n’est point épais, car ses deux premiers intervalles forment un ton & demi ; somme plus grande que le ton qui suit. Voyez Tétracorde, Genre, &c. (S)

EPAISSISSANT, (Thérapeutique.) Voyez Incrassant.

EPAISSISSEMENT, s. m. (Medecine.) se dit ordinairement des humeurs du corps humain qui ont trop de consistance.

Toutes les parties élémentaires qui constituent le composé des corps fluides, ont une certaine force de cohésion entr’elles ; il en est par conséquent de même de ceux qui se trouvent dans les animaux : & pour que ceux-ci puissent couler dans la cavité des plus petits conduits, il est nécessaire que les molécules qui y sont portées sous une forme plus ou moins volumineuse, se séparent les unes des autres, pour pouvoir passer chacune en particulier avec un diametre proportionné à celui du canal ; il faut par conséquent que les puissances qui font mouvoir ces masses fluides, & les poussent vers les dernieres filieres des vaisseaux, ayent une force supérieure à celle de la cohésion des molécules, qui les tient unies entre elles jusqu’à un certain point, & leur donne le degré de consistance convenable à leur nature & à leurs usages.

S’il arrive donc par quelque cause que ce soit, que la cohésion des parties élémentaires qui composent les humeurs du corps humain, soit augmentée, de maniere que ne pouvant pas être séparées les unes des autres par l’action du cœur & des vaisseaux, ces particules restent unies ; & que conservant un volume trop considérable, respectivement à la capacité des vaisseaux dans lesquels elles doivent être distribuées, elles trouvent de la résistance à couler dans leurs extrémités, elles y causent des engorgemens, des obstructions de différente nature, selon la différence des humeurs épaissies. La plûpart d’entr’elles, comme le sang, la lymphe, n’étant fluides que par accident, c’est-à-dire à cause des parties aqueuses qui entrent dans leur composition, qui leur servent de véhicule, & du mouvement de la vie saine, qui s’oppose continuellement à leur concrétion, sont par conséquent naturellement très-disposées à contracter ce vice, & à devenir par-là moins propres à circuler, à être distribuées dans leurs vaisseaux respectifs. Le mouvement & le repos, la chaleur & le froid, la force & la foiblesse du corps, favorisent également cette disposition, & produisent l’épaississement de ces

différens fluides : comme aussi bien d’autres causes, telles que les coagulans acides, spiritueux ; les visqueux, les huileux mêlés avec la mane des humeurs.

Ainsi on doit employer pour corriger ce vice, des moyens aussi différens que ses causes. Si le sang trop épais occasionne des engorgemens inflammatoires dans le poumon, dans le foie, la saignée & les délayans sont les remedes que l’on met en usage avec succès dans ce cas : ce même traitement ne pourroit que produire de très-mauvais effets, si on l’employoit pour combattre la viscosité pituiteuse. Voyez Sang, & ses vices ; Obstruction, Inflammation. (d)

EPANADIPLOSE, s. f. figure de diction, ἐπαναδίπλωσις. Ce mot est composé de la préposition ἐπὶ, & de ἀναδίπλωσις, reduplicatio. R. διπλόος, duplex. Il y a anadiplose & épanadiplose ; ce sont deux especes de répétitions du même mot. Dans l’anadiplose, le mot qui finit une préposition, est répeté pour commencer la préposition suivante :

. . . Sequitur pulcherrimus Astur,
Astur equo fidens
. Æneid. l. X. v. 180.


& dans Ovide, au second livre des Métam. v. 206.

. . . Sylvæ cum montibus ardent ;
Ardet Athos, Taurusque
, &c.


& en françois, Henriade, liv. I.

Il apperçoit de loin le jeune Teligny ;
Teligny, dont l’amour a mérité sa fille.


au lieu que dans l’épanadiplose le même mot qui com. mence une préposition, est répeté pour finir le sens total :

Ambo storentes ætatibus, Arcades ambo. Virg. ég. 7.


& Ovide, au liv. II. des Fastes, v. 235. dit :

Una dies Fabios ad bellum miserat omnes ;
Ad bellum missos perdidit una dies
.


On trouve le dystique suivant dans deux anciennes inscriptions rapportées par Gruter ; l’une au tome I. p. 615. & l’autre au tome II. p. 912.

Balnea, vina, Venus, corrumpunt corpora nostra ;
Sed vitam faciunt balnea, vina, Venus.

L’épanadiplose est aussi nommée épanaplese par Donat & par quelques autres grammairiens.

Pour moi je trouve qu’il suffit d’observer qu’il y a répétition, & de sentir la grace que la répétition apporte au discours, ou le dérangement qu’elle cause. Il est d’ailleurs bien inutile d’appeller la répétition, ou anadiplose, ou épanadiplose, selon les diverses combinaisons des mots répetés. Ceux qui se sont donné la peine d’inventer ces sortes de noms sur de pareils fondemens, ne sont pas ceux qui ont le plus enrichi la république des Lettres. (F)

EPANCHEMENT, s. m. (Medec.) Ce terme est employé à-peu-près dans le même sens qu’effusion, extravasation ; il semble cependant plus particulierement affecté pour exprimer l’écoulement considérable d’un fluide dans quelqu’espace du corps humain qui n’est pas destiné à en contenir, comme lorsque la sérosité du sang sort de ses vaisseaux, & se répand dans la cavité du bas-ventre : d’où résulte une hydropisie ascite, &c. Voyez Effusion, Extravasation, Hydropisie, &c. (d)

EPANNELER, v. act. terme de Sculpture ; c’est couper à pans. Le sculpteur-statuaire, après avoir déterminé la base du bloc de marbre qu’il veut employer, & avoir fait faire le lit pour la plinthe, épannele le bloc ; c’est-à-dire qu’après avoir dessiné avec le crayon sur ce bloc, & arrêté les masses principales de son sujet, il fait donner plusieurs trait de scie ou de