Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 5.djvu/883

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

+r (en faisant, si l’on veut, abstraction de son égalité à zéro, & en la regardant comme une quantité algébrique réelle) sera divisible exactement par . Car il est évident, 1°. que x ne montant qu’au premier degré dans le diviseur, on pourra par les regles de la division algébrique ordinaire (voyez Division), pousser l’opération jusqu’à ce qu’on arrive à un reste que j’appelle R, & dans lequel x ne se trouvera pas. Soit donc Q le quotient, il est évident que si au produit du quotient Q par le diviseur , on ajoûte le reste R, on aura une quantité égale & identique au dividende. Or, en faisant dans le dividende , tout s’évanoüit par l’hypothese ; donc tout doit s’évanoüir aussi, en faisant dans la quantité , & cette quantité doit alors se réduire à zéro ; mais en faisant , cette quantité est . Donc, puisque , on a . Donc la division se fait sans reste. Donc se divise exactement par .

Je fais un raisonnement semblable sur le quotient provenu de la division : je suppose que b substitué à la place de x, fasse évanoüir tous les termes de ce quotient, je dis qu’il est divisible par  ; & il est évident que si b substitué à la place de x, fait évanoüir le quotient Q, il fera évanoüir aussi le dividende : car le dividende est ; donc toute supposition qui réduira Q à zéro, y réduira aussi le dividende. Donc divise aussi exactement le dividende.

On trouvera de même, qu’en supposant une quantité c, qui substituée à la place de x, fasse évanoüir le quotient de Q divisé par , ce nouveau quotient, & par conséquent le dividende, sera divisible par .

Ainsi on aura autant de quantités simples , qu’il y a d’unités dans m, lesquelles quantités simples donneront par leur multiplication le dividende ou équation proposée.

On pourra donc, au lieu de l’équation donnée, supposer  : mais il faut bien se garder d’en conclure, comme font tous les auteurs d’Algebre, qu’on aura , &c. car, pourra dire un commençant, comment se peut-il faire qu’une même quantité x soit égale à plusieurs grandeurs différentes a, b, c ? Si vous dites que x, dans ces équations, ne désigne qu’en apparence la même grandeur, & désigne en effet des grandeurs différentes, en ce cas vous vous rejettez dans une autre difficulté ; car si cela étoit, dans une équation du second degré, par exemple, comme ne seroit plus un quarré, cependant tous les Algébristes le traitent comme tel ? Voici la réponse à cette difficulté, qui, comme je le sai par expérience, peut embarrasser bien des commençans. La quantité proposée est le produit de par , par , &c. Or la quantité proposée est supposée égale à zéro, & quand une quantité est égale à zéro, il faut qu’un de ses facteurs le soit ; ainsi la quantité ou équation proposée est le produit de par & par , &c. ou de par & par , &c. ou de par & par , &c. Dans chacun de ces cas on ne suppose à la fois qu’une des équations partielles égale à zéro ; x est la même quantité dans chacun des cas, & elle est différente dans les différens cas. Ainsi est par , ou par  ; cette équation représente ces deux-ci ; l’une (en mettant a pour x), & l’autre (en mettant b pour x).

Dans l’un des cas, x & ses puissances représentent a & ses puissances ; dans l’autre, x & ses puissances représentent b & ses puissances. Ainsi une équation d’un degré quelconque représente réellement autant d’équations particulieres qu’il y a d’unités dans son degré ; équations dans chacune desquelles x a une valeur différente. Poursuivons & approfondissons cette matiere, qui, je le répete, est fort mal développée par-tout.

La démonstration précédente, dira-t-on, suppose qu’il y a toûjours une quantité a possible, qui substituée à la place de x dans une quantité algébrique, , &c. fera évanoüir tous les termes. Sans doute : mais cette supposition est légitime. J’ai démontré le premier, Mém. de l’ac. de Berlin, 1746, qu’il y avoit toûjours en effet une telle quantité, laquelle sera ou réelle, ou égale à , m & n étant réelles, & m pouvant être =0. Cette proposition fondamentale de l’Algebre & même du calcul intégral (Voyez Fraction rationnelle & Intégral) n’avoit été démontrée par personne avant moi : j’y renvoye le lecteur, il la trouvera encore plus développée, & mise à la portée des commençans dans le traité du calcul intégral de M. de Bougainville le jeune, premiere partie. Voyez Imaginaire.

De-là il s’ensuit qu’une équation est le produit d’autant de quantités simples, , &c qu’il y a d’unités dans le degré de l’équation ; quelques-unes des quantités a, b, c, ou toutes, peuvent marquer des quantités réelles, égales ou inégales, imaginaires simples comme , ou mixtes imaginaires comme .

On remarquera maintenant que le produit de par ne peut être égal à un autre produit par  ; car si cela étoit, on auroit . Il faudroit donc ou que fût divisible exactement par , ainsi que par , ce qui ne se peut, ou que & eussent un diviseur commun, ainsi que & , ce qui ne se peut encore. Tout cela est évident par soi-même.

Donc une quantité quelconque , où x monte au second degré, ne peut être le produit que de deux facteurs simples , & il ne peut y en avoir d’autres que ces deux-là. Donc dans une équation du second degré, x ne peut avoir que deux valeurs différentes a, b, & jamais davantage. C’est une suite des propositions précédentes.

De même on ne sauroit supposer par par , égal à par par  ; car on auroit . Donc les dénominateurs de ces fractions devroient avoir un diviseur commun, & par conséquent aussi leurs numérateurs , ce qui ne se peut Donc dans une équation du troisieme degré, & par la même raison dans toute équation, l’inconnue ne peut avoir qu’autant de valeurs, soit réelles, soit imaginaires, qu’il y a d’unités dans le degré de l’équation. Voilà encore une proposition qu’aucun auteur n’avoit suffisamment prouvée. On appelle racines, les différentes valeurs de l’inconnue. Voyez Racine.

Il pourroit se présenter aux commençans une difficulté sur la démonstration précédente. Soit, diront-ils, , & , on aura  ; on peut donc avoir, continueront-ils, . La réponse à cette objection est bien simple ; il est vrai qu’il peut y avoir des cas où, en donnant à x une certaine valeur, on ait  ; mais il faudroit, pour