Page:Diogène Laërce - Vies et doctrines des philosophes de l’Antiquité, trad. Zévort.djvu/506

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ne se détournait, ne se dérangeait pour rien ; il suivait sa route quelque chose qui se rencontrât, chariots, précipices, chiens, etc. ; car il n’accordait aucune confiance aux sens. Heureusement, dit Antigonus de Caryste, ses amis l’accompagnaient partout et l’arrachaient au danger. Cependant Énésidème assure que, tout en proclamant dans la théorie la suspension du jugement, il n’agissait pas indistinctement et au hasard. Il vécut jusqu’à l’âge de quatre-vingt-dix ans.

Antigonus de Caryste, dans le livre intitulé Pyrrhon, donne sur lui les détails suivants : « Il avait d’abord été peintre, mais pauvre et obscur. On conserve même dans le gymnase d’Élis des lampadophores assez médiocres de sa composition. Il voyageait souvent, recherchait la solitude, et ne se montrait que rarement dans sa patrie. Il se réglait en cela sur ce qu’il avait entendu dire à un Indien qui reprochait à Anaxarque son assiduité dans le palais des rois, et le peu de soin qu’il prenait de former les hommes à la vertu. Il avait une égalité d’âme inaltérable, si bien que, quand on l’abandonnait au milieu d’un discours, il n’en continuait pas moins à parler ; et cependant il avait eu dans sa jeunesse un caractère bouillant et emporté. Souvent il se mettait en voyage, sans prévenir personne de son dessein, et prenait pour compagnons de route ceux qui lui agréaient. Un jour qu’Anaxarque était tombé dans un bourbier, il continua son chemin sans le secourir ; quelqu’un lui en fit reproche, mais Anaxarque lui-même loua le calme inaltérable et l’impassibilité de son caractère. Une autre fois on le surprit à parler tout seul, et, comme on lui en demandait la raison, il répondit : Je médite sur les moyens de devenir homme de bien. Dans les discussions, on prisait beaucoup sa