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ESSAI SUR LECONTE DE LISLE

force vers, paraît-il. Valade a depuis deux jours cinglé vers ces bords qu’arrose la Gironde. Coppée, rendu fou par mes récits de Bruxelles, se propose d’aller, à la fin du mois, avec Silvestre, faire visite, lui aussi, à « l’autre Maître » — comme dit Essarts. Du reste, pas le moindre vers à l’horizon. Dierx, entr’autres, se distingue par sa non-fécondité depuis les Lèvres Closes. France s’occupe d’un volume, Statues et bas-reliefs. Voilà, cher Maître et ami, toutes les nouvelles. Il fait une insupportable chaleur : la fête du 15 Août a été d’un hideux rare. Tout le monde souhaite votre prompt retour… »

Une dédicace du Maître, sur une page, est un « inappréciable bonheur ». L’espoir qu’il « lira » une nouvelle qu’on lui a soumise « fait battre le cœur.[1] »

Son disciple préféré, J. M. de Heredia, en villégiature à Bagnères, ne se contente pas de dépeindre à son grand ami les belles « buveuses d’eau aux robes multicolores, à pied, à cheval, à baudet, en voiture, en chaise à porteurs » ; il ajoute : « J’ai eu, chez le libraire, une douce émotion en y trouvant un exemplaire des Poèmes Antiques. Décidément Lemerre et Leconte de Lisle pénètrent même au fond des antres de la civilisation.[2] »

Et le poète apparaît, à la fin, à son entourage, comme une personnalité divine en séjour sur la terre. M. Robert de Montesquiou, qui vient d’obtenir de lui une Préface, pour son livre des Chauves Souris, le remercie en ces termes lyriques… « Vous n’avez pas voulu qu’une chose, venant de vous, n’unit pas, toute la grâce à toute la force. C’est pourquoi vous vous êtes délicatement complu à revêtir, de spirituelle confraternité, votre bénédiction fraternelle, comme les Dieux en voyage, voilaient, leurs formes olympiennes, pour ne pas anéantir les mortels.[3] »…

  1. Maurice Barrès.
  2. 25 août 1874.
  3. 20 juin 1884. Et, presque à la même minute, le Vicomte de Guerne écrit : « Mon respect devant votre œuvre ne vous est pas