Page:Dostoïevski - Carnet d’un inconnu 1906.djvu/225

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tances actuelles, on ne peut laisser traîner cette affaire. Et puis, c’est bientôt le carême pendant lequel on ne marie plus. J’espère que vous me comprenez ?

— Parfaitement et je m’engage à tenir la parole que je vous ai donnée. Mais je ne puis vous aider dans cette affaire et je crois de mon devoir de vous en prévenir.

— Pourquoi donc ?

— Comment ! pourquoi ? m’écriai-je, donnant enfin carrière à mon indignation. Mais est-ce que vous ne comprenez pas que cette action est malhonnête ? Il est vrai que vous escomptez à juste titre la faiblesse d’esprit et la regrettable manie de cette demoiselle, mais c’est précisément ce qui devrait arrêter un honnête homme. Vous-même, vous la reconnaissez digne de respect. Et voici que vous abusez de son triste état pour lui extorquer cent mille roubles ! Il n’y a pas de doute que vous n’avez aucune intention d’être véritablement son mari et que vous l’abandonnerez… C’est d’une telle ignominie que je ne puis comprendre que vous me proposiez une collaboration à votre entreprise !

— Oh ! mon Dieu ! que de romantisme ! s’écria Mizintchikov avec le plus sincère étonnement.