Page:Dostoïevski - Carnet d’un inconnu 1906.djvu/226

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D’ailleurs, est-ce même du romantisme ? Je crois tout simplement que vous ne me comprenez pas. Vous dites que c’est malhonnête ? mais il me semble que tout le bénéfice est pour elle et non pour moi… Prenez seulement la peine de réfléchir.

— Évidemment, à votre point de vue, vous accomplissez un acte des plus méritoires en épousant Tatiana Ivanovna ! répliquai-je en un sourire sarcastique.

— Mais certainement, un acte des plus généreux ! s’exclama Mizintchikov en s’échauffant à son tour. Veuillez réfléchir que c’est, avant tout, le sacrifice de ma personne que je lui fais en devenant son mari ; ça coûte tout de même un peu, je présume ? Deuxièmement, je ne prends que cent mille roubles pour ma peine et je me suis donné ma parole que je ne prendrais jamais un sou de plus ; n’est-ce donc rien ? Enfin, allez au fond des choses. Quelle vie pourrait-elle espérer ? Pour qu’elle vécût tranquille, il serait indispensable de lui enlever la disposition de sa fortune et de l’enfermer dans une maison de fous, car il faut constamment s’attendre à ce qu’un vaurien, quelque chevalier d’industrie orné de moustaches et d’une barbiche à l’espagnole, dans le genre d’Obnoskine, s’en