Page:Dostoïevski - Le Sous-sol, 1909.djvu/165

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fierté qu’elle avait assisté à une soirée dansante, « chez de très braves gens, qui ont de la famille et qui ne savent rien, absolument rien ». — parce qu’elle était nouvelle ici et que ce n’était que pour un temps… quelle n’était pas du tout décidée encore de rester, et qu’elle partirait certainement, dès qu’elle aurait payé sa dette…

Eh bien ! il y avait là cet étudiant, qui avait causé et dansé avec elle toute la soirée, et il s’était trouvé qu’autrefois, dans leur enfance, il l’avait connue à Riga, qu’ils avaient joué ensemble, mais il y avait longtemps de cela ; qu’il connaissait ses parents, et ne savait rien, rien de cela et ne s’en doutait même pas ! Et le lendemain, après la soirée dansante, (il y avait de cela trois jours), il avait envoyé cette lettre par l’amie qui l’avait accompagnée à la soirée… et… « voilà tout. »

Elle baissa ses yeux étincelants avec une certaine pudeur, quand elle eut fini son récit.

La pauvrette, elle gardait la lettre de cet étudiant comme un trésor et avait couru chercher cette unique richesse, ne voulant pas me laisser partir sans que j’apprisse qu’elle aussi était aimée honnêtement et sincèrement, et qu’on s’adressait à elle avec respect. Il était certain que cette lettre était destinée à rester dans son coffret, sans conséquences. Mais c’est égal, je suis sûr qu’elle l’a gardée toute sa vie comme un trésor, comme son orgueil et sa justification, et à cet instant même, elle s’en était souvenue et avait