Page:Driant - L’invasion noire 3-fin de l’islam devant Paris,1913.djvu/133

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Il atteignait la hauteur de 6.600 mètres, dominant de 1.800 mètres le sommet principal et subissant un froid de 17° qui contraignit miss Clipott à s’enfuir dans sa cabine, pendant que sa maîtresse, enveloppée dans une riche fourrure, contemplait extasiée le paysage neigeux.

Deux heures après l’aérostat s’inclinait doucement sur les plaines riantes de la Lombardie où courent parallèlement les affluents du Pô, et les passagers voyaient poindre dans l’éloignement une large tache sombre tranchant dans la verdure des champs.

C’était Turin.

— Pauvre Italie, fit de Melval : elle, déjà ruinée par les armements du temps de paix, que va-t-elle devenir avec l’effort nouveau qui lui est imposé aujourd’hui ?

— Ne la plains pas, va, mon commandant, car ça n’a pas changé et elle ne nous aime guère ; d’ailleurs elle reçoit des subsides des autres puissances, et justement je me demande quels effectifs elle pourrait mettre en ligne si, comme elle peut le craindre, elle est obligée de tenir tête à une partie des forces musulmanes dans la trouée de la Vénétie.

— C’est un renseignement que je puis vous donner très complet, mon capitaine, dit une voix derrière eux.

Les deux officiers se retournèrent. Celui qui leur parlait ainsi était un jeune homme à la physionomie mobile et intelligente, portant l’uniforme des soldats de la section du Vengeur, uniforme assez semblable à celui des chasseurs à pied avec le signe distinctif des aérostiers militaires (un ballon jaune sur la manche gauche).

— Volontiers, répondit Zahner, le premier moment de surprise passé.

— Vous lirez peut-être dans certains journaux italiens que cette puissance peut mettre sur pied 2.933.000 hommes c’est une pure fantasmagorie ; d’après les aveux de ses généraux les plus compétents, elle ne serait « en état ni de les instruire, ni de les équiper, ni de les armer ».

— Je vous crois sans peine, fit de Melval.

— Tous mes compliments, jeune homme, fit Zahner, vous êtes supérieurement documenté et je suis tout surpris que de pareilles questions vous intéressent.

— Elles ne m’intéressent pas du tout, répliqua le soldat.

— Ah ! fit Zahner interloqué.