Page:Driant - L’invasion noire 3-fin de l’islam devant Paris,1913.djvu/17

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— Avant un mois, fit Kaddour…

— Oui, crois-tu la chose impossible ?…

— Impossible, non, car tu as prouvé, Maître, que ce mot t’était inconnu ; mais il y a plus de 150.000 soldats russes dans la ville, 38 cuirassés anglais avec plus de 500 canons et 20.000 hommes d’équipage à leur bord ; les forts anciens et nouveaux sont armés de 800 pièces de gros calibre ; de plus il arrive encore tous les jours des troupes russes des Balkans. Je me suis procuré tous ces renseignements avant de repartir de Constantinople pour Salonique, où je demandai à revenir prendre mes dernières dispositions avant d’agir.

— Eh bien, dit le Sultan, je veux qu’avant quinze jours toutes ces forces si imposantes soient en désarroi, qu’avant trois semaines elles soient en fuite ou désorganisées, et plus je vais, plus je crois que Dieu m’envoie les instruments dont j’ai besoin à l’heure même où ils deviennent nécessaires. Toi-même, Kaddour, n’es-tu pas un de ces instruments ?

— Dispose de moi, seigneur !

— Je suis fatigué par la longueur de ma course d’aujourd’hui. Omar va t’expliquer ce que j’ai ordonné à Mohammed-Agatsh, le chef de nos médecins ; il conservera son titre, toi tu redeviens le médecin attaché à ma personne.

— Merci, merci, Maître, dit le vieux Turc ; là était toute mon ambition.

— Viens dans mes bras, mon vieux serviteur… si Dieu permet que je vive pour le triomphe de sa cause, ta besogne sera facile. S’il a marqué la limite de ma vie, tous tes efforts seront vains ; mais je n’en remets pas moins entre tes mains le dépôt d’une existence précieuse à l’Islam, et ta place sera un jour à mes côtés à la droite d’Allah.

— Maître, répondit Kaddour, mon bon Maître, je suis déjà payé de mon dévouement par le bonheur de te retrouver, et les Européens sont fous s’ils se figurent qu’un vrai croyant peut devenir un traître. Seulement, je te le répète, prends bien garde au flacon que tu tiens.

Le Sultan regarda encore une fois la liqueur transparente, et se tournant vers Omar…

— Qu’adviendrait-il si on avalait tout le contenu du flacon ?

— On n’aurait pas le temps de l’avaler tout entier, dit le