Page:Du Bellay - Œuvres complètes, édition Séché, tome 2.djvu/61

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Entre deux langues erroit.
Jà, jà le feu ravissant
Des douces flammes cruelles
D’un long souspir languissant
Humoit leurs tiedes moelles :
Et voicy de toutes parts
Mille petits nœuds espars,
Dont les deux amants lacez
Plus fort s’estraignent et lient,
Que les vignes ne se plient
Sur les ormes embrassez.
Près du lict, qui gemissoit,
Tesmoing d’un si doux martyre
Le jaloux se tappissoit,
Mordant ses deux lèvres, d’ire,
Puis courant deçà delà.
En sa chambre ilappella
Toute la trouppe des Dieux,
Et pallissant de colère
Leur monstra cest adultère,
Joyeuse fable des cieux.
Mars paisible à ceste fois.
Fronçant le haut de sa face,
Remaschoit à basse voix
Je ne sçay quelle menasse.
Venus d’un regard piteux
Tenoit en bas l’œil honteux,
Et de ses beaux doigts polis,
En vous mignardant sa force,
Gà et là cacher s’efforce
Et les roses, et les lis.
Celuy qui a veu le tour
De l’araigne mesnagère
Filant ses rais alentour
De la mouche passagère,
Il a veu Mars et Venus
Enchaînez à menbres nuds :
Et Vulcain guignant auprès
De son embusche araigneuse.
Qui la couple vergongneuse
Alloit serrant de si près.