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couvertes de pins et de cyprès : ce sont les arbres les plus communs qu’on voie depuis Ning po jusqu’à Hang tcheou.

L’arbre qui porte le suif n’est guère moins commun, surtout vers Ning po, où l’on ne trouve presque point d’autres arbres. Ils étaient alors dépouillés de feuilles, et couverts de fruits dont la coquille était tombée : de sorte que voyant un fruit blanc et attaché par bouquets à l’extrémité des branches, on eût dit de loin que ces arbres étaient chargés de fleurs.

Le 28 au matin nous passâmes une espèce de lac ou plutôt de bras de mer appelé Tsao hou et ce fut à nos dépens ; car le mandarin nous déclara que n’ayant point d’ordre de l’empereur, il ne pouvait pas hors le district de Ning po obliger les officiers à nous fournir ce qui nous était nécessaire. C’est pourquoi il nous fallut louer de nouvelles barques, et défrayer le mandarin jusqu’à Hang tcheou.

Ce jour-là nous naviguâmes sur ce beau canal dont le père Martini fait mention, mais dont il ne donne pas une assez belle idée. Ce canal dure l’espace de près de vingt lieues ; il est revêtu d’un côté de grandes pierres plates, longues de cinq à six pieds, larges de deux, et épaisses de deux à trois pouces : son eau est nette et très belle : sa largeur est communément de 20 et 30 pas géométriques et quelquefois de 40 et davantage. Il continue en divers endroits plus d’une lieue en ligne droite, souvent il est double.

Mais ce qui est plus ordinaire depuis le commencement jusqu’à la fin, et que le père Martini ne dit pas, c’est que de distance en distance on trouve à droite et à gauche plusieurs beaux canaux, qui communiquent avec celui-ci, et qui s’étendent de part et d’autre dans la campagne, où ils se partagent en plusieurs autres, formant un grand nombre d’îles : ce qui fait comme un grand labyrinthe jusqu’aux montagnes, qui bordent ces belles campagnes, lesquelles sont plates et unies comme une glace.

C’est dans cet agréable lieu qu’est bâtie la ville de Chao hing laquelle est traversée par un grand nombre de canaux. Les ponts y sont très fréquents, la plupart d’une seule arcade. Ces ponts sont fort élevés, les arcades ont peu d’épaisseur vers le haut, ce qui les rend plus faibles que les nôtres : aussi n’y passe-t-il point de charrettes : ce sont des portefaix qui transportent les fardeaux ; on passe ces ponts en montant et descendant des escaliers plats et doux, dont les marches n’ont pas souvent trois pouces d’épaisseur.

Il y a de ces ponts qui au lieu d’arches, ont trois ou quatre grandes pierres sur des piles en forme de planche. Nous en avons vu dont les pierres avaient dix, douze, quinze, et dix-huit pieds de longueur. On en trouve quantité sur ce grand canal qui sont bâtis très proprement.

La campagne qui en est arrosée est très agréable et très fertile : on découvre de grandes plaines couvertes de riz et de légumes, qui sont la nourriture d’un peuple immense : elle est diversifiée d’une infinité de bouquets de cyprès semés ça et là sur les tombeaux.

Aux environs de Chao hing et de là presque jusqu’à Hang tcheou, on voit une suite continuelle de maisons et de hameaux, qui feraient croire que c’est une ville perpétuelle. Les maisons de la campagne et des villageois y sont bâties plus proprement, et sont mieux entretenues que les maisons