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toute confiance en lui ; de concert avec les Grands de l’empire, il se saisit de la personne du prince, dans le temps que depuis plus de trois mois il n’habitait que les forêts ; il l’envoya en exil, et mit sur le trône son frère cadet, nommé Tchong kang. Cette révolution, qui arriva la quarante-septième du cycle, se fit fort paisiblement, et il ne se trouva personne qui prit les intérêts du prince dépossédé.


TCHONG KANG. Quatrième empereur.
A régné treize ans


On ne compte point parmi les années du règne de cet empereur, toutes celles qui s’écoulèrent jusqu’à la mort de son frère, parce que tant que ce prince vécut, Tchong kang refusa constamment de prendre le titre d’empereur.

Il y eut autant de prudence que de modestie dans cette conduite. Il craignit qu’un ministre, qui avait eu assez d’autorité et de crédit pour détrôner son frère, ne conçût un jour le même dessein à son égard. Néanmoins comme il lui était redevable de la couronne, il trouva un expédient pour ne pas manquer ni à la reconnaissance qu’il lui devait, ni à sa propre sûreté.

Il témoigna qu’il ne pouvait se passer des conseils d’un ministre aussi habile que l’était Y, et qu’il souhaitait de l’avoir auprès de sa personne. Y donna dans le piège, et ne douta pas qu’il ne se rendît bientôt maître de l’esprit du prince, et que sous son nom il ne gouvernât l’empire. Cet emploi était incompatible avec celui qu’il avait de commander l’armée. Tchong kang donna un emploi si important à Tcheou, officier habile, et d’une fidélité pour le prince à toute épreuve. Ce trait de prudence servit beaucoup à l’affermir sur le trône.

Y s’apercevant dans la suite qu’il n’avait nulle part, ni à la faveur, ni à la confiance de Tchong kang, jura de s’en venger, et d’éteindre la famille impériale ; il cacha néanmoins son ressentiment ; mais comme il ne lui était pas possible d’exécuter son projet, tandis que Tcheou serait à la tête des troupes ; et que d’ailleurs il ne pouvait pas espérer de corrompre un fidèle sujet, il s’efforça plusieurs fois de le rendre suspect au prince ; n’ayant pu réussir, il chercha, mais inutilement, le moyen de faire périr Tcheou.

Toutes ces tentatives furent vaines. Ainsi il se borna à gagner sous main les Grands de l’empire par ses bienfaits, et il eut l’adresse de s’insinuer par mille complaisances dans l’esprit et les bonnes grâces du prince héritier, jusqu’à ce qu’il eût la facilité de commettre sans aucun risque le crime qu’il méditait.

Tai kang mourut sur ces entrefaites la cinquante-huitième année