Page:Du halde description de la chine volume 1.djvu/550

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Dans une expédition qu’il entreprit, pour éteindre un petit royaume, et en faire une province de l’empire, il assiégea la ville principale de cet État. Il arriva que pendant la nuit il y eut beaucoup de mouvements dans le camp que commandait Tchao frère de l’empereur ; et le lendemain le bruit se répandit, que ce tumulte avait sa source dans le projet que formaient les soldats, de mettre Tchao leur chef sur le trône. L’empereur dissimula, et ne pensa qu’à se rendre maître de la place.

Quelques jours après qu’elle fut prise, son frère s’entretenant familièrement avec lui, témoigna sa surprise de ce qu’il différait si longtemps à récompenser ceux qui s’étaient distingués dans ce siège. « Je m’attendais, répondit l’empereur, que ce serait vous qui les récompenseriez. »

Cette réponse chagrina tellement Tchao, qu’avant la nuit il se tua lui-même. Aussitôt que l’empereur apprit la mort de son frère, il tomba dans une espèce de pamoison, et versant un torrent de larmes, il ne pouvoir se lasser d’embrasser son cadavre. Il lui fit rendre les plus grands honneurs à ses obsèques.

Il souhaitait avec passion, de recouvrer les places que ses prédécesseurs avaient cédé trop légèrement aux Tartares de Leao tong. Tchang si hien, qui commandait ses armées, s’efforça de le dissuader de cette entreprise, parce que, disait-il, il est plus à propos de pacifier le dedans de l’empire, et lorsque la tranquillité y sera affermie, on aura plus de loisir et de facilité de réduire ces barbares.

L’empereur n’ayant pas été de cet avis, on livra plusieurs combats, où la victoire pencha tantôt du côté des Chinois, et tantôt du côté des Tartares. Le général Tchang tsi hien usa d’un stratagème remarquable, pour faire lever le siège d’une ville qu’ils assiégeaient. Il fit partir trois cents soldats, il donna à chacun d’eux une torche allumée, avec ordre de s’approcher le plus près qu’ils pourraient du camp des ennemis. Ceux-ci, frappés d’une si grande quantité de lumières, crurent que toute l’armée des Chinois venait fondre sur eux ; la terreur et l’épouvante s’empara de leurs cœurs, et ils prirent incontinent la fuite. Comme le général avait placé des embuscades de toutes parts sur leur passage, il se fit un si grand carnage de ces fuyards, qu’il y en eut très peu qui s’échappèrent.

Ce prince mourut à l’âge de cinquante-neuf ans, la trente-quatrième année du cycle. Son troisième fils nommé Tchin tsong, lui succéda.