Page:Du halde description de la chine volume 1.djvu/88

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assesseurs, suivant la nature des affaires. S’il s’agit de finances et de matières civiles, l’affaire est portée au trésorier général, ou pou tching se. Si c’est une cause criminelle, elle est renvoyée au lieutenant criminel, ngan tcha se. S’il s’agit d’affaires qui regardent les postes, le sel, etc. on a recours à l’yen tao. Enfin s’il s’agit des vivres qu’on lève comme tribut, on s’adresse au leang tao : mais outre ces affaires, qui sont essentiellement attachées à leur tribunal, le peuple peut encore s’adresser à eux pour différentes affaires, parce que tous les tribunaux subalternes de la province dépendent d’eux, et qu’ils sont par leur emploi les conseillers nés du viceroi. C’est sous cette qualité qu’ils sont obligés plusieurs fois chaque mois de se rendre au tribunal de ce grand mandarin, pour délibérer et dire leur sentiment sur ce qui se passe de plus important dans la province.

Comme les officiers des troupes dépendent aussi en quelques sorte du viceroi, et qu’ils sont obligés sous de grandes peines, de l’informer des moindres mouvements du peuple, qui surviennent dans l’étendue de leurs départements, il arrive que presque toutes les affaires, soit civiles, soit criminelles, soit militaires du gouvernement, reviennent enfin à son tribunal ; et il est d’autant plus respectable, que les Cours souveraines de Peking ne décident ordinairement que sur ses informations, et qu’elles ratifient presque toujours la sentence qu’il a portée contre les mandarins, qu’il a droit de casser, en leur ôtant même le sceau par avance.

Il est vrai que le trésorier général et le lieutenant criminel peuvent accuser le gouverneur de la province ; mais comme ils craignent d’avoir le dessous, et qu’ils se perdent mutuellement par cette dissension, que les lois condamnent comme nuisible au bien du peuple, ils ne s’accordent que trop bien, et ferment les yeux sur la conduite l’un de l’autre. S’ils en viennent à un éclat, il faut que la chose soit si criante, qu’elle ne puisse manquer d’être portée en cour, ou qu’elle intéresse extrêmement leur honneur particulier, ou leur propre repos.

Ceux-mêmes que l’empereur envoie dans les provinces, pour les affaires et le bien du peuple, reviennent souvent gagnés par les honnêtetés et par les présents des grands mandarins, et n’ont garde de faire un rapport trop désavantageux à leurs bienfaiteurs, lors même qu’ils croient ne pouvoir éviter d’en faire des plaintes à Sa Majesté. Ainsi c’est à la pénétration du prince à découvrir ce qu’ils enveloppent, et à les suivre dans leurs détours, pour être instruit de la vérité. C’est à quoi feu l’empereur Cang hi réussissait admirablement bien, comme on pourrait le prouver par divers exemples si c’était ici le lieu de parler de sa haute sagesse, connue d’ailleurs et depuis longtemps dans les royaumes les plus éloignés.

On peut dire cependant que malgré sa vigilance et sa pénétration, il y a eu sous son règne bien des désordres en ce genre : mais son quatrième fils, qui lui a succédé, y a apporté des remèdes efficaces, en fournissant libéralement aux frais que ses envoyés sont obligés de faire, et en punissant rigoureusement ceux qui ont reçu et ceux qui ont donné.

Les censeurs publics de l’empire nommés catao yu se qui résident à