Page:Du halde description de la chine volume 2.djvu/22

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en interrompent la continuité, on dirait à la voir de loin dans la campagne, que ce ne serait que l’enceinte d’un vaste parc carré.

On voit encore quelques villes, dont une partie du terrain est désert et vide de maisons, parce qu’elles n’ont point été rétablies, depuis qu’elles ont été ruinées par les Tartares qui conquirent la Chine. Mais ce qu’il y a de particulier, c’est qu’auprès des grandes villes, surtout dans les provinces méridionales, on voit des espèces de villes flottantes ; c’est une multitude prodigieuse de barques rangées des deux côtés de la rivière, où logent une infinité de familles qui n’ont point d’autres maisons. Ainsi l’eau est presque aussi peuplée que la terre ferme.


Ordres des Chinois.

Il n’y a proprement que deux ordres dans l’empire : celui des nobles, et celui du peuple : ce premier comprend les princes du sang, les ducs, les comtes, les mandarins, soit de lettres, soit d’armes ; ceux qui ont été mandarins et qui ne le sont plus ; les lettrés, qui par leur étude et par les premiers degrés de littérature, auxquels ils sont parvenus, aspirent à la magistrature et aux dignités de l’empire. Dans le second, qui est celui du peuple, sont compris les laboureurs, les marchands, et les artisans. Il faut donner la connaissance de ces différents états ; et c’est ce que je ferai en suivant la méthode que je me suis prescrite.




De l’autorité de l’empereur, des sceaux de l’empire, de ses dépenses ordinaires, de son palais, de ses équipages, et de sa marche lorsqu’il sort du palais.



De l'autorité de l'empereur.

Il n’y a jamais eu d’État plus monarchique que celui de la Chine : l’empereur a une autorité absolue et à en juger par les apparences, c’est une espèce de divinité. Le respect qu’on a pour lui, va jusqu’à l’adoration ; ses paroles sont comme autant d’oracles, et ses moindres volontés exécutées comme s’il était descendu du Ciel ; personne ne peut lui parler qu’à genoux, non pas même son frère quoi que son aîné, et l’on n’oserait paraître devant lui en cérémonie que dans cette posture, à moins qu’il n’en ordonne autrement. Il n’est permis qu’aux seigneurs qui l’accompagnent de se tenir debout, et de ne fléchir qu’un genou quand ils lui parlent.

La même chose se pratique envers les officiers, lorsqu’ils représentent la personne de l’empereur, et qu’ils intiment ses ordres, ou comme envoyés, ou comme mandarins de la présence. On a presque les mêmes égards pour les gouverneurs, lorsqu’ils rendent la justice ; de sorte qu’on peut dire que, quant à la vénération et au respect qu’on a pour eux, ils sont empereurs à l’égard du peuple, et qu’ils sont peuple à l’égard de ceux qui sont au-dessus d’eux. Ordre admirable qui contribue plus que toute autre chose, au repos et à la tranquillité de