Page:Du halde description de la chine volume 2.djvu/870

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la vraie doctrine est négligée : je voudrais me retirer ; mais je vous vois déjà sur l’âge. C’est ce qui fait mon embarras et le sujet de ma tristesse.

Le devoir d’une femme, reprit la mère, c’est d’accommoder à manger, de coudre, et de bien régler l’intérieur de la maison. Le dehors n’est point de son ressort. Quand nous sommes encore filles, nous sommes soumises à un père et à une mère. Quand nous sommes mariées, nous dépendons de nos maris, et nous devons les suivre où ils veulent. Enfin quand nous sommes veuves, et que nous avons des fils avancés en âge, nous devons aussi les suivre, comme nous faisions nos maris. C’est ce que prescrivent les rits à l’égard de notre sexe. Je suis âgée, cela est vrai ; mais n’importe. Faites votre devoir, mon fils, que je n’y sois point un obstacle ; je saurai faire aussi le mien.


King kiang fille de condition, fut mariée à Mou pé, qui avait le rang de ta fou à la cour de Lou. Elle en eut un fils nommé Ouen pé. Mou pé étant mort, King kiang se trouva chargée de l’éducation de son fils. Elle eut soin de le faire bien étudier : et quand les études furent finies, et qu’il revint à la maison, elle veilla avec soin sur sa conduite, Elle observa plus d’une fois que ceux qui venaient voir Ouen pé, le traitaient tous avec beaucoup de cérémonie ; elle conclut de là que son fils n’avait liaison qu’avec des gens au-dessous de lui pour l’âge et pour tout le reste ; et par conséquent qu’il se regardait comme n’ayant plus besoin d’instruction.

Un jour la compagnie s’étant retirée, elle l’appela pour lui faire une réprimande : Autrefois, lui dit-elle, Vou vang[1] sortant de la salle d’audience, une de ses jarretières se détacha, et son bas tombait ; regardant autour de soi, il n’y vit pas un seul homme, auquel il crut pouvoir ordonner de lui remettre son bas[2]. Il se baissa aussitôt et le fit lui-même. Hoen kong avait toujours à ses côtés trois bons amis. Il entretenait cinq officiers exprès pour observer ses fautes, et pour l’en reprendre : et il n’y avait point de jour qu’il n’écoutât sur ses défauts trente personnes. Tcheou kong dans un repas présentait jusqu’à trois fois des meilleurs mets aux vieillards. Il leur ajustait les cheveux : et quand se chargeant du gouvernement il fit ses visites, on compta parmi ceux qu’il visita plus de 70 vieillards pauvres, et logés dans les plus petites rues. Ces trois grands hommes étaient princes. Voilà cependant comme ils s’abaissaient. Au reste c’était à l’égard des gens plus âgés qu’eux ; ils n’en admettaient pas d’autres pour l’ordinaire. Par là il leur était plus facile d’oublier, pour ainsi dire, leur rang et leur dignité ; et ils faisaient chaque jour des progrès sensibles dans la vertu. Pour vous, mon fils, vous prenez une route bien contraire, vous êtes jeune et sans emploi. Cependant je vois que ceux avec qui vous avez des liaisons, vous cèdent en tout, et vous regardent comme leur supérieur. Ce sont sans doute des gens encore plus jeunes, et aussi peu avancés que vous. Quel avantage pouvez-vous tirer de ces liaisons ?

  1. Il était empereur.
  2. C’est qu’il n’avait avec soi que des gens d’un grand âge et d’un grand mérite qu’il respectait.