Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/132

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foiblesse que montre cet empereur. C’est faire tort à la réputation qu’il a laissée, c’est aller contre les loix de la vrai-semblance et du pathetique veritable que de lui donner un caractere si mol et si effeminé. L’historien, dont Monsieur Racine a tiré le sujet de sa piece, raconte seulement que Titus renvoïa Berenice, et qu’ils se separerent à regret. Cet auteur ne dit point que Titus se soit abandonné à la douleur excessive où il est toujours plongé dans la piece dont je parle. Quand même l’avanture seroit narrée par Suetone avec les circonstances dont Monsieur Racine a trouvé bon de la revêtir, il n’auroit pas dû la choisir comme un sujet propre à la scene tragique. La gloire du succès ne répare pas toujours la honte d’un combat où nous devions remporter l’avantage d’abord. Un ennemi bien inégal nous surmonte en quelque façon, s’il dispute trop long-tems la victoire contre nous. En effet dix mille allemands, qui n’auroient battu six mille turcs en rase campagne qu’après un combat de douze heures, seroient honteux de leur propre victoire. Aussi quoique Berenice soit