Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/167

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tout au plus nous donner quelqu’inquiétude pour eux par les contretems fâcheux qui leur arrivent, et qui doivent être plûtôt des traverses que de veritables infortunes, afin que nous soïons plus satisfaits de les voir heureux à la fin de la piece. Elle veut, en nous faisant rire aux dépens des personnages ridicules, nous corriger des défauts qu’elle jouë, afin que nous devenions meilleurs pour la societé. La comedie ne sçauroit donc rendre le ridicule de ses personnages trop sensible aux spectateurs. Les spectateurs, en demêlant sans peine le ridicule des personnages, auront encore assez de peine à y reconnoître le ridicule qui peut être en eux. Or nous ne pouvons pas reconnoître aussi facilement la nature quand elle paroît revêtuë de mœurs, de manieres, d’usages et d’habits étrangers, que lorsqu’elle est mise, pour ainsi dire, à notre façon. Les bienséances d’Espagne, par exemple, ne nous étant pas aussi connuës que celles de France, nous ne sommes pas choquez du ridicule de celui qui les blesse, comme nous le serions si ce personnage blessoit les bienséances en usage dans notre patrie et dans notre tems. Nous ne serions pas aussi frappez