Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/21

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dont ils étoient si dégoutez. On les accuse souvent à tort d’avoir fait parade d’une moderation feinte lorsqu’ils ont pris le parti de la retraite. Ils étoient alors de bonne foi ; mais comme l’agitation excessive leur a fait souhaiter une pleine tranquillité, un trop grand loisir leur fait regreter le tems où ils étoient toujours occupez. Les hommes sont encore plus legers qu’ils ne sont dissimulez ; et souvent ils ne sont coupables que d’inconstance, dans les occasions où l’on les accuse d’artifice.

Veritablement l’agitation où les passions nous tiennent, même durant la solitude, est si vive, que tout autre état est un état de langueur auprès de cette agitation. Ainsi nous courons par instinct après les objets qui peuvent exciter nos passions, quoique ces objets fassent sur nous des impressions qui nous coutent souvent des nuits inquietes et des journées douloureuses : mais les hommes en general souffrent encore plus à vivre sans passions, que les passions ne les font souffrir.