Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/294

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besoin d’un feu divin, et non pas pour rimer. Un poëte mediocre peut à force de consultations et de travail faire un plan regulier, et donner des mœurs décentes à ses personnages ; mais il n’y a qu’un homme doué du genie de l’art qui puisse soutenir ses vers par des fictions continuelles, et par des images renaissantes à chaque periode. Un homme sans genie tombe bientôt dans la froideur qui naît des figures qui manquent de justesse, et qui ne peignent point nettement leur objet, ou dans le ridicule qui naît des figures lesquelles ne sont point convenables au sujet. Telles sont, par exemple, les figures que met en œuvre le carme auteur du poëme de la Magdelaine, qui forment souvent des images grotesques, où le poëte ne devroit nous offrir que des images serieuses. Le conseil d’un ami peut bien nous faire supprimer quelques figures impropres ou mal imaginées ; mais il ne peut nous inspirer le genie necessaire pour inventer celles dont il conviendroit de se servir. Le secours d’autrui comme nous le dirons en parlant du genie, ne sçauroit faire un poëte. Il peut tout au plus lui aider à se former. Un peu de reflexion sur la destinée