Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/298

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lisant un poëte de ce que nous faisons en lisant un autre livre. En lisant un historien, par exemple, nous regardons son stile comme l’accessoire. L’important c’est la verité, c’est la singularité des faits qu’il nous apprend. En lisant un poëme nous regardons les instructions que nous y pouvons prendre comme l’accessoire. L’important c’est le stile, parce que c’est du stile d’un poëme que dépend le plaisir de son lecteur. Si la poësie du stile du roman de Telemaque eut été languissante, peu de personnes auroient achevé la lecture de l’ouvrage, quoiqu’il n’en eut pas été moins rempli d’instructions profitables. C’est donc suivant que la lecture d’un poëme nous plaît que nous le loüons. On remarquera que je ne parle ici que des personnes qui étudient ; car celles qui lisent principalement pour s’amuser, et en second lieu pour s’instruire (c’est l’usage cependant que les trois quarts du monde font de la lecture) aiment encore mieux les livres d’histoire dont le stile est interessant, que les livres d’histoire mal écrits, mais pleins d’exactitude et d’érudition. Bien des personnes suivent même ce goût dans le choix qu’elles sont des livres de philosophie,

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