Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/299

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et d’autres sciences encore plus serieuses que la philosophie. Qu’on juge si le monde ne doit pas trouver que le poëme qui sçait le mieux lui plaire doit être le meilleur. Les hommes qui ne lisent les poëmes que pour être entretenus agréablement par des fictions, se livrent donc dans cette lecture au plaisir actuel. Ils se laissent aller aux impressions que fait sur eux l’endroit du poëme qui est sous leurs yeux. Lors que cet endroit les occupe agréablement, ils ne s’avisent gueres de suspendre leur plaisir pour faire reflexion, s’il n’y a point de fautes contre les regles. Si nous tombons sur une faute grossiere et sensible, notre plaisir est bien interrompu. Nous pouvons bien alors faire des reproches au poëte ; mais nous nous reconcilions avec lui dès que ce mauvais endroit du poëme est passé, dès que notre plaisir est recommencé. Le plaisir actuel qui domine les hommes avec tant d’empire qu’il leur fait oublier les maux passez et qu’il leur cache les maux à venir, peut bien nous faire oublier les fautes d’un poëme qui nous ont choquez davantage, dès qu’elles ne sont plus sous nos yeux. Quant à ces fautes relatives,

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