Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/30

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avec tant de plaisir des hommes, païez pour cela, se battre jusqu’à se faire des blessures dangereuses, qu’on peut croire qu’il auroit de veritables gladiateurs à la romaine, si la bible défendoit un peu moins positivement de verser le sang des hommes hors les cas d’une absoluë necessité. On peut dire la même chose d’autres nations très-polies et qui font profession de la religion ennemie de l’effusion du sang humain. Les fêtes les plus cheres à nos ancêtres, les tournois n’étoient-ils pas des spectacles où la vie des tenans couroit un veritable danger ; il y arrivoit quelquefois que la lance à roquet blessoit à mort aussi-bien que la lance à fer émoulu : la France ne le sçut que trop quand le roi Henri Ii fut blessé mortellement dans une de ces fêtes. Mais nous avons dans nos annales une preuve encore plus forte que celle-là, pour montrer qu’il est dans les spectacles les plus cruels une espece d’attrait capable de les faire aimer des peuples les plus humains. Les combats en champ clos, entre deux ou plusieurs champions, furent long-tems en usage parmi nous ; et les personnes les plus considerables de la nation y tiroient l’épée par un motif plus serieux que celui de divertir l’assemblée ; c’étoit pour vuider leurs querelles, c’étoit pour s’entre-