Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/304

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monde a decidé pour L’Arioste, seduit par la poesie de son stile. Elle l’emporte veritablement sur la poesie de la Jerusalem delivrée, dont les figures ne sont pas souvent convenables à l’endroit où le poete les met en œuvre. Il y a souvent encore plus de brillant et d’éclat dans ces figures, que de verité. Je veux dire qu’elles surprennent et qu’elles ébloüissent l’imagination, mais qu’elles n’y peignent pas distinctement des images propres à nous interesser. Voilà ce que M Despreaux a défini le clinquant du Tasse, et les étrangers, à l’exception de quelques compatriotes du dernier, ont souscrit à ce jugement. quant au poëte dont toutes ces merveilles sont tirées, dit M Addison, en parlant d’un opera italien dont le sujet avoit été pris dans le Tasse, je suis de l’avis de M Despreaux, qu’un vers de Virgile vaut mieux que tout le clinquant du Tasse. Il est vrai néanmoins pour continuer la figure, qu’on trouve quelquefois de l’or le plus pur, à côté de ce clinquant. On voudroit inutilement faire changer de sentiment aux italiens, et l’on se doute bien de ce qu’ils répondroient à l’étranger qui s’aviseroit de les réprimander

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