Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/331

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celles qui font dans la prononciation un bruit, lequel imite le bruit inarticulé dont nous nous servirions par instinct naturel, pour donner l’idée de la chose que la phrase exprime avec des mots articulez. Les auteurs latins sont remplis de ces phrases imitatives, qui ont été admirées et citées avec éloge par les écrivains du bon tems. Elles ont été loüées par les romains du tems d’Auguste, qui étoient juges competens de ces beautez. Tel est le vers de Virgile qui dépeint Poliphéme. Ce vers prononcé en supprimant les syllabes qui font élision, et en faisant sonner l’u comme les romains le faisoient sonner, devient pour ainsi parler un vers monstrueux. Tel est encore le vers où Perse parle d’un homme qui nazille, et qu’on ne sçauroit aussi prononcer qu’en nazillant. Le changement arrivé dans la prononciation du latin nous a voilé, suivant les apparences, une partie de ces