Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/378

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

p368

quoique grossiers, ont dû paroître des ouvrages divins. L’admiration pour un art naissant fait tomber aisément dans l’exageration ceux qui parlent de ses productions, et la tradition en recueillant ces récits outrez, aime encore quelquefois à les rendre plus merveilleux qu’elle ne les a reçus. On trouve même dans les écrivains anciens des choses impossibles données pour vraïes, et des choses ordinaires traitées de prodiges. Sçavons-nous d’ailleurs quel effet auroient produit sur des hommes aussi sensibles et aussi disposez à se passionner que l’étoient les compatriotes des anciens peintres de la Grece, plusieurs tableaux de Raphaël, de Rubens et d’Annibal Carrache ? Enfin on ne sçauroit donner une idée un peu précise des tableaux à ceux qui ne les ont pas vûs absolument, et qui ne connoissent pas la maniere du peintre qui les a faits, que par voïes de comparaison. Nous-mêmes, lorsque nous parlons à quelqu’un des tableaux d’un peintre qu’il ne connoît pas, nous sommes poussez par l’instinct à nous servir de cette voïe de comparaison. Nous donnons l’idée du peintre inconnu en le comparant aux peintres connus, et