Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/40

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finiront avec la répresentation de la fiction ingenieuse qui les fait couler.

Nous écoutons donc avec plaisir les hommes les plus malheureux quand ils nous entretiennent de leurs infortunes par le moïen du pinceau d’un peintre, ou dans les vers d’un poëte ; mais, comme le remarque Diogene Laerce, nous ne les écouterions qu’avec repugnance s’ils déploroient eux-mêmes leurs malheurs devant nous. Le peintre et le poëte ne nous affligent qu’autant que nous le voulons, ils ne nous font aimer leurs heros et leurs heroïnes qu’autant qu’il nous plaît, au lieu que nous ne serions pas les maîtres de la mesure de nos sentimens ; nous ne serions pas les maîtres de leur vivacité comme de leur durée, si nous avions été frappez par les objets mêmes que ces habiles artisans ont imitez. Il est vrai que les jeunes gens qui s’adonnent à la lecture des romans, dont l’attrait consiste dans des imitations poëtiques, sont sujets à être tourmentez par des afflictions et par des desirs très-