Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/405

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incontestable dans la méchanique, c’est que la multiplicité des ressorts affoiblit toûjours le mouvement, parce qu’un ressort ne communique jamais à un autre tout le mouvement qu’il a reçû. D’ailleurs il est une de ces operations, celle qui se fait quand le mot reveille l’idée dont il est le signe, qui ne se fait pas en vertu des loix de la nature. Elle est artificielle en partie. Ainsi les objets que les tableaux nous presentent agissant en qualité de signes naturels, ils doivent agir plus promptement. L’impression qu’ils font sur nous doit être plus forte et plus soudaine que celle que les vers peuvent faire. Quand nous lisons dans Horace la description de l’amour qui aiguise ses traits enflammez sur une pierre arrosée de sang ; les mots dont le poëte se sert pour faire sa peinture réveillent en nous les idées, et ces idées forment ensuite dans notre imagination le tableau où nous voïons l’amour dépêcher ce travail. Cette image nous touche ; mais quand elle nous est representée dans un tableau, elle nous touche bien davantage. Nous voïons alors en un instant ce que les vers nous font seulement