Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/422

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cette comédie, comme il auroit fallu la faire copier de son temps, que l’art de l’impression n’étoit pas encore inventé ? Cependant la representation de cette farce nous amuse. L’appareil de la scéne nous prépare à être émus, et l’action théatrale donne une force merveilleuse aux vers. Comme l’eloquence du corps ne persuade pas moins que celle des paroles ; les gestes aident infiniment la voix à faire son impression. L’instinct naturel nous l’apprend, en nous enseignant que ceux qui nous écoutent parler sans nous voir, ne nous entendent qu’à demi. En effet, la nature a assigné un geste particulier à chaque passion, à chaque sentiment. Chaque passion a de même un ton particulier et une expression particuliere sur le visage. Le premier mérite du déclamateur, est celui de se toucher lui-même. L’émotion intérieure de celui qui parle, jette un pathétique dans ses tons et dans ses gestes que l’art et l’étude n’y sçauroient mettre. On est prévenu pour l’acteur qui paroît être ému lui-même.

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