Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/44

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SECTION IV.

Du pouvoir que les imitations ont sur nous, et de la facilité avec laquelle le cœur humain est ému.


Personne ne doute que les poëmes ne puissent exciter en nous des passions artificielles, mais il paroîtra peut-être extraordinaire à bien du monde et même à des peintres de profession, d’entendre dire que des tableaux, que des couleurs appliquées sur une toile puissent exciter en nous des passions : cependant cette verité ne peut surprendre que ceux qui ne font pas d’attention à ce qui se passe dans eux-mêmes. Peut-on voir le tableau du Poussin qui répresente la mort de Germanicus, sans être ému de compassion pour ce prince et pour sa famille, comme d’indignation contre Tibere ? Les graces de la gallerie du Luxembourg et plusieurs autres tableaux n’auroient pas été défigurez, si leurs possesseurs les eussent vûs sans émotion ; car tous les tableaux ne sont pas du genre de ceux dont parle Aristote, quand il dit : qu’il est des tableaux aussi capables de faire rentrer en eux-