Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/55

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voudroit établir dans les actions de l’homme qui, selon lui, doivent être reglées par son intelligence, et non pas gouvernées par les appetits de l’ame sensitive.

Platon reproche encore un autre inconvenient à la poësie : c’est que les poëtes en se mettant aussi souvent qu’ils le font à la place des hommes vicieux dont ils veulent exprimer les sentimens, contractent à la fin les mœurs vicieuses dont ils font tous les jours des imitations. Il est trop à craindre que leur esprit ne se corrompe à force de s’entretenir des idées qui occupent les hommes corrompus. prequens imitatio, a dit depuis Quintilien en parlant des comediens, transit in mores.

Platon appuie de sa propre experience les raisonnemens qu’il fait sur les mauvais effets de la poësie. Après avoir avoüé que souvent il s’est trop laissé seduire à ses charmes, il compare la peine qu’il sent à se separer d’Homere à la peine d’un amant forcé, après bien des combats, à quitter une maîtresse qui prend trop d’empire sur lui. I