Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/94

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Comme le tableau qui répresente une action, ne nous fait voir qu’un instant de sa durée, le peintre ne sçauroit atteindre au sublime que les choses qui ont precedé la situation présente jettent quelquefois dans un sentiment ordinaire. Au contraire la poësie nous décrit tous les incidens remarquables de l’action qu’elle traite, & ce qui s’est passé jette souvent du merveilleux sur une chose fort ordinaire qui se dit ou qui arrive dans la suite. C’est ainsi que la poësie peut emploïer ce merveilleux qui naît des circonstances, & qu’on appellera si l’on veut un sublime de rapport. Telle est la saillie du misantrope qui, rendant un compte serieux des raisons qui l’empêchent de s’établir à la cour, ajoute après une déduction des contraintes réelles & gênantes qu’on s’épargne en n’y vivant point.

On n’a pas à louer les vers de messieurs tels.

Cette pensée devient sublime par le caractere connu du personnage qui parle, & par la procedure qu’il vient d’essuier, pour avoir dit que des vers mauvais ne valoient rien.

Il est encore plus facile, sans comparaison, au poëte qu’au peintre de nous affectionner à ses personnages, et