Aller au contenu

Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, Tome 2,1733.djvu/118

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

vers. Je veux vous apprendre à faire des vers avec peine, répondit Despreaux, et vous avez assez de talent pour le sçavoir bien-tôt. Racine disoit que Despreaux lui avoit tenu parole. Mais ces peines et ces contradictions ne sont point capables de dégoûter de la poësie un jeune homme qui tient sa vocation d’Apollon même, et qu’excite encore le desir de se faire un nom et une fortune. Il parviendra, soit un peu plûtôt, soit un peu plus tard, au dégré du parnasse où il est capable de monter : mais l’usage qu’il fera de sa capacité, dépendra beaucoup du temps où son étoile l’aura fait naître. S’il vient en des temps malheureux, sans Auguste et sans Mécene, ses productions ne seront ni fréquentes, ni de si longue haleine que s’il étoit né dans un siecle plus fortuné pour les arts et pour les sciences. Virgile encouragé par l’attention qu’Auguste donnoit à ses vers : Virgile excité par l’émulation a produit l’éneïde : il a emploïé une infinité de veilles à composer un poëme de longue haleine, qui malgré le goût que son génie devoit lui donner pour ce travail, doit l’avoir fatigué souvent jusques à la lassitude. Si Virgile avoit vécu dans un temps, sans