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Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, Tome 2,1733.djvu/137

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faire un pastiche sous le nom du Georgeon ou du Titien. Il faudroit avoir un génie presque égal à celui du peintre qu’on veut contrefaire, pour réussir à faire prendre notre ouvrage pour être de ce peintre. On ne sçauroit donc contrefaire le génie des grands hommes, mais on réussit quelquefois à contrefaire leur main, c’est-à-dire, leur maniere de coucher la couleur et de tirer les traits, les airs de tête qu’ils repetoient et ce qui pouvoit être de vicieux dans leur pratique. Il est plus facile d’imiter les défauts des hommes que leurs perfections. Par exemple, on reproche au Guide d’avoir fait ses têtes trop plates. Ses têtes manquent souvent de rondeur, parce que leurs parties ne se détachent point et ne s’élevent pas assez l’une sur l’autre. Il suffit donc, pour lui ressembler en cela, de se négliger et de ne point se donner la peine de pratiquer ce que l’art enseigne à faire pour donner de la rondeur à ses têtes. Jordan le napolitain, que ses compatriotes appelloient il sa presto , ou le depêche besogne , étoit après Teniers un des grands faiseurs de pastiche, qui jamais ait tendu des pieges aux curieux. Fier d’avoir contrefait avec succès quelques