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Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, Tome 2,1733.djvu/145

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autant qu’il lui est possible de le faire. Les hommes ne se flattent point intérieurement autant qu’on le croit communément. Ils ont du moins quelque lueur de ce qu’ils peuvent valoir au juste, et ils s’apprétient eux-mêmes dans le fond de leur cœur, à peu près à la valeur qu’ils ont dans le monde. Les hommes qui ne sont ni souverains, ni ministres, ni trop proches parens des uns et des autres, ont des occasions si fréquentes de connoître ce qu’ils valent véritablement, qu’il faut bien qu’ils s’en doutent à la fin, à moins qu’ils ne soient pleinement stupides. On ne s’applaudit pas seul durant long-temps, et Cotin ne pouvoit pas ignorer que ses vers ne fussent huez du public. Cette hauteur de bonne opinion que montrent les poëtes médiocres, est donc souvent affectée. Ils ne pensent pas tout le bien qu’ils disent de leur ouvrage ? Peut-on douter que les poëtes ne parlent souvent de mauvaise foi sur le mérite de leurs vers ? N’est-ce pas contre leur propre conscience qu’ils protestent que le meilleur de leurs ouvrages est précisement celui que le public estime le moins. Mais ils veulent soûtenir le poëme dont la foiblesse a besoin d’appui, en montrant