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Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, Tome 2,1733.djvu/350

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ces beautez voilées. Deux ou trois vers qu’il a laissez passer sans y faire attention, et qui lui auroient plû, s’il en avoit compris tout le sens, ne l’auroient pas empêché d’être ennuïé par quinze cens autres qu’il a parfaitement entendus. Le dessein de la poësie et de la peinture étant de toucher et de plaire, il faut que tout homme qui n’est pas stupide puisse sentir l’effet des bons vers et des bons tableaux. Tous les hommes doivent donc être en possession de donner leur propre suffrage, quand il s’agit de décider si les poëmes ou les tableaux font l’effet qu’ils doivent faire. Ainsi lorsqu’il s’agit de juger de l’effet general d’un ouvrage, le peintre et le poëte sont aussi peu en droit de recuser ceux qui ne sçavent pas leur art, qu’un chirurgien seroit en droit de recuser le témoignage de celui qui a souffert une operation lorsqu’il est question uniquement de sçavoir si l’operation a été douloureuse, sous le prétexte que le malade seroit ignorant en anatomie. Que penseroit-on du musicien qui soutiendroit que ceux qui ne sçavent pas la musique, sont incapables de décider si le menuet qu’il a composé