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Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, Tome 2,1733.djvu/390

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porte du cœur fermée. Les décisions des gens du métier, bien que sujettes à toutes les illusions dont nous venons de parler, ne laissent point d’avoir beaucoup de part à la premiere réputation d’un ouvrage nouveau. En premier lieu, s’ils ne peuvent pas faire blâmer un ouvrage par ceux qui le connoissent, ils peuvent empêcher beaucoup de gens de le connoître en les détournant de l’aller voir ou de le lire. Ces préventions qu’ils répandent dans le monde, ont leur effet durant un temps. En second lieu, le public prévenu en faveur du discernement des gens du métier, pense durant un temps qu’ils aïent meilleure vûë que lui. Ainsi comme l’ouvrage auquel ils veulent bien rendre justice, parvient bien-tôt à la réputation bonne ou mauvaise qui lui est dûë ; le contraire arrive lorsqu’il ne la lui rendent pas, soit qu’ils prévariquent, soit qu’ils se trompent de bonne foi. Quand ils se partagent, ils détruisent leur crédit, et le public juge sans eux. C’est à l’aide de ce partage qu’on a vû Moliere et Racine parvenir si promptement à une grande réputation.