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Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, Tome 2,1733.djvu/444

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travaillent, quand leur nation commence à vouloir sortir de la barbarie. Mais nos bons poëtes françois ont imité les anciens comme Horace et Virgile avoient imité les grecs, c’est-à-dire, en suivant comme les autres l’avoient fait le génie de la langue dans laquelle ils composoient, et en prenant comme eux la nature pour leur premier modele. Les bons écrivains n’empruntent des autres que des manieres de la copier. Le stile de Racine, de Despreaux, de La Fontaine et de nos autres compatriotes illustres, ne sçauroit vieillir assez pour dégoûter un jour de la lecture de leurs ouvrages, et jamais on ne pourra les lire sans être touché de leurs beautez. Elles sont naturelles. En effet, notre langue me paroît être parvenuë depuis soixante et dix ans à son point de perfection. Au temps de D’Ablancourt, un auteur imprimé depuis soixante ans paroissoit un écrivain gothique. Or, quoiqu’il y ait déja plus de quatrevingt ans que D’Ablancourt a écrit, son stile ne nous paroît point vieilli. Pour bien écrire, il faudra toujours s’assujettir aux regles que cet auteur et ses premiers successeurs ont suivies. Tout changement raisonnable qui