Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, Tome 2,1733.djvu/508

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être qu’un sophisme. Ainsi le poëme qui a plû à tous les siecles et à tous les peuples passez est réellement digne de plaire, nonobstant les défauts qu’on y peut remarquer, et par consequent il doit plaire toujours à ceux qui l’entendront dans sa langue. La prévention, repliquera-t-on, est presque aussi capable de nous séduire en faveur d’un ouvrage en vers, qu’en faveur d’un systême. Par exemple, quand nous voïons ceux qui nous élevent, ceux qui nous instruisent durant l’enfance, admirer l’éneïde, leur admiration laisse en nous un préjugé qui nous la fait trouver encore meilleure qu’elle ne l’est réellement. Ils nous engagent par le crédit qu’ils ont sur nous à penser comme eux. Leurs sentimens deviennent les nôtres, et c’est à de pareils préjugez que Virgile et les auteurs qu’on nomme communément classiques , doivent la plus grande partie de leur réputation. Les critiques peuvent donc donner atteinte à cette réputation en sappant le fondement des préjugez qui nous exagerent le mérite de l’éneïde de Virgile, et qui nous font paroître ses églogues si supérieures à d’autres, qui dans la verité ne leur cedent de gueres. On appuïera