Page:Dufay - L’Impôt Progressif en France,1905.djvu/235

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Notre situation est telle, quand on la considère dans son ensemble, que l’on croirait vraiment qu’il suffit d’être travailleur pour n’avoir pas de quoi vivre, ou de vivre dans des conditions trop difficiles. Je reçois de la Belgique des renseignements sur l’installation des filatures ; je suppose bien qu’en France elle n’est guère meilleure. « Ce sont de longues salles trop basses, contenant chacune cinquante métiers à filer, espacés de moins d’un mètre. Les huit dixièmes de

    il y a des spéculations à peine annoncées qui ont donné lieu en janvier à l’émission de papiers valeurs à 175 francs pièce, tels que la manufacture d’automobiles Aujœldi, et qui, en trois jours, sont arrivés à doubler leur valeur et dépassent 582 francs.
    Les obligations du Rapid, autre fabrique d’automobiles, émises à 25 francs, sont maintenant cotées 180 fr. Or ces sociétés n’ont pas même encore posé les fondations des bâtiments qui formeront l’usine et ne donneront de dividende que dans deux ou trois ans.
    Que veux dire cela ? Que ces sociétés, soit parce qu’elles ont profité ignominieusement de certaines inventions, produit du génie, et ont acheté à vil prix des brevets qui leur donneront un rendement énorme, soit parce qu’on sait d’avance que chaque heure de travail d’un ouvrier qui est payé de 20 à 40 centimes l’heure, transformée en produit, sera payée à la société en raison de 2 francs assurant un bénéfice à venir qui inspire une confiance énorme dans le public qui en pousse la valeur à la Bourse. Ne serait-il pas plus humain et plus utile à l’économie publique italienne que la loi frappât d’une taxe plus forte le surplus du rendement des actions dont le rendement dépasse le 10 % sur le capital nominal ?
    Il arriverait qu’avant tout, les sociétés qui prévoient de dépasser ce rendement supérieur à 10 % trop avantageux pour le fisc, s’arrangeraient pour améliorer avant tout la paye des ouvriers, et ceux-ci, trouvant une journée rémunératrice en Italie même, n’émigreraient pas en masse de leur beau pays comme ils le font.
    Ensuite, elles ne spéculeraient pas si vilement sur le produit du génie des penseurs et travailleurs qui, après tant de fatigues, d’application, de patience, et même de sacrifices de fortune, récoltent parfois à peine de quoi rentrer dans leurs déboursés, tandis que les actionnaires qui, bien souvent, n’ont pas la moindre idée de surmenage de l’inventeur, s’enrichissent du fruit de sa vieillesse précoce. Les inventeurs, voyant leurs collègues bien récompensés, foisonneraient, pour la plus grande gloire de ce pays doué d’un peuple heureux par son imagination fertile qui se revaudrait de la protection accordée à ses fils, par une richesse générale, au moins plus morale, sinon sensiblement augmentée.
    L’impôt progressif serait en ce sens un facteur réel de vertu et de morale pratique.