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de la lettre du 12 janvier 1769 comme devant « tenir lieu de testament. » À la vérité, l’acte de 1763 n’était qu’une minute sans date ni signature, et la transcription plus régulière, remise à Davenport, a pu demeurer inconnue à Du Peyrou. Néanmoins on ne s’explique pas pourquoi il a gardé le silence sur cette pièce : peut-être l’avait-il oubliée.

Dans son dispositif, comme dans sa rédaction, le testament du philosophe, semblable à sa vie, est d’une simplicité qu’il a voulue : il s’applique à ne dire que le strict nécessaire, sans phrases superflues. Mais comme son infirmité lui causait de continuels soucis, il a profité de l’occasion pour exposer le résultat de ses observations personnelles, avec plus de détails et de précisions que dans ses Confessions et sa correspondance. Le document constitue, par là, une adjonction[1] notable au dossier dispersé qu’on possédait. Bien que la maladie de Rousseau ait fait l’objet, depuis soixante-dix ans, d’un grand nombre de mémoires et d’articles, la discussion sur cette question controversée n’est probablement pas encore close. Pour le moment, l’opinion qui paraît prévaloir dans le monde médical est celle du Dr Régis, professeur adjoint à la Faculté de Bordeaux : d’après lui, l’auteur du Contrat social et d’Émile était « un neurasthénique artérioscléreux » et il ajoute que « sa neurasthénie fut surtout une neurasthénie psychique, avec son état mental et moral, son hyperesthésie émotive, ses obsessions et ses phobies caractéristiques[2]. »

  1. Une lettre de Jean-Jacques, du 10 mai 1758, à un médecin qui n’est pas nommé, renferme aussi des détails à relever ; ils ont échappé au spécialistes, parce que cette lettre ne fait pas partie des éditions courantes de la Correspondance. Elle n’a été imprimée que dans les Œuvres inédites, publiées par Musset-Pathay, 1825, t. I. p. 36, 37.
  2. Voy. Dr E. Régis. Étude médicale sur J.-J. Rousseau, six article dans la Chronique médicale, 1er février, 1er et 15 mars, 1er avril, 15 juin, 1er juillet 1900 ; et La neurasthénie de J.-J. Rousseau, dans la Revue philomatique de Bordeaux et du Sud-Ouest, 1er juillet 1900 ; tirage à part, in-8o de 15 p. ; — Gr.-J.-M. Sibiril, Histoire médicale de Jean-Jacques Rousseau. Thèse pour le doctorat en médecine. Bordeaux, 1900, in-8o de 161 p. ; — Dr Cabanès, Le cas pathologique de J.-J. Rousseau, dans Le cabinet secret de l’histoire, 3e série, nouv. édit., Paris. 1905, pet. in-8o,