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LA PHYSIQUE PARISIENNE AU XIVe SIÈCLE

mondes ; il ne fait aucun appel au raisonnement tiré de l’impossibilité du vide. Ce raisonnement, au contraire, il le reprend lorsqu’il écrit ses Communia naturalium, ou mieux ce traité De caelestibus dont le manuscrit célèbre de la Bibliothèque Mazarine fait le second livre des Communia naturalium. Après avoir résumé l’argumentation d’Aristote, il écrit[1] :

« Nous ajouterons, à cette intention, une démonstration mathématique.

» S’il y avait plusieurs mondes, en effet, il faudrait admettre le vide, ce qui a été réfuté précédemment d’une manière générale. Cette conséquence est évidente par la XIIe proposition du troisième livre d’Euclide, pour quiconque connaît la pureté de la Géométrie ; cette pureté de la Géométrie, je la suppose toujours connue en ces Naturalia, car je l’ai précédemment exposée. En effet, si ces mondes sont partout distants, il y aura le vide. S’ils sont conjoints, ils ne le seront qu’en un point, par cette douzième proposition, et leurs convexités, [à partir de ce point], s’écarteront l’une de l’autre. »

D’ailleurs, le chapitre du traité De Caelestibus où Bacon combat la pluralité des mondes est, tout aussitôt, suivi d’un long chapitre où se trouve développée cette pensée d’Aristote : Hors du monde, il n’existe, il ne peut exister aucun corps, en sorte qu’au delà du ciel, il n’y a ni espace plein ni espace vide.

« Que le vide ne puisse exister en la nature réelle, écrit Bacon[2], nous l’avons montré précédemment en nos discours généraux ; mais nous avons seulement montré qu’il n’existait pas au-dessous du ciel. Jusqu’à présent, nous avons réservé la considération spéciale du vide hors du ciel. Lors donc qu’à plusieurs reprises, en ce qui vient d’être dit, j’ai supposé la non-existence du vide, je l’ai supposé en vertu de la considération générale par laquelle il a été prouvé que le vide ne peut exister. En particulier, donc, je dis d’une manière semblable qu’il ne peut être hors du ciel. » Une argumentation longue, souvent confuse, parfois puérile appuie cette affirmation.

Par Michel Scot, par Guillaume d’Auvergne, par • Roger Bacon, le sort de cette proposition : Le monde est nécessaire¬

1. Incipit secundus liber coirununium naturalium [Rogeri Bacon] qui est de eelestibusy vel de celo et mundot pars III, cap. II (Bibliothèque Mazarine, ms. n° 3576, fol. 108, col. a et b). — Liber secundus communium naturalium Fratris Rogeri. De celestibus. Ed. Steele, pp. 374-375.

2. Rogeri Bacon Op. laud>, pars III, cap. III ; ms. cit., fol. 109, col. c ; éd. Steele, p. 379.

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