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LA PHYSIQUE PARISIENNE AU XIVe SIÈCLE

monstré par les raisons dessus mises ausquelles je ay respondu ; et doncques ne convient autrement respondre à ceste.

» Mes ceste raison pourroit estre confermée ou formée autrement ; car se II mondes estoient un hors de l’autre, il conviendroit que, entre les II, eust vuit, pour ce que il seroient de figure spérique ; et c’est impossible que rien soit vuit, si comme Aristote prove ou quart de phisique.

» Je respon. Et me semble premièrement que entendement humain aussi comme naturellement se consent que, hors le ciel, le monde, qui n’est pas infini, est aucune espace, quelle qu’elle soit ; et ne puet bonnement consevoir le contraire, et semble que ainsi soit par raison.

» Premièrement, car si le derrenier ciel estoit ; par dehors, de figure autre que de spérique, et que il eust aucune superéminence dehors, en manière de angle ou boce, et il fust meu, si comme il est, circulairement, il conviendroit que celle bosse passast par une espace, qui seroit vuide quant celle boce en seroit hors. Et pour ce que le ciel ne soit pas de telle figure, et que nature ne le pourroit faire, toutevoies est-ce chose ymaginable sans contradiction et que Dieu porroit faire.

» Item, posé que l’espère des élémens ou touz les corps corruptibles qui sont dedens la concavité du ciel ou de l’espère de la Lune fussent adnichilés, et que le ciel demourast tel comme il est, il conviendroit pas nécessité que, en ceste concavité, eust une distance et une espace vuide. Et telle chose est ymaginable et simplement possible ; ja soit ce que ce ne pourroit estre fait par vertu purement naturele, si commp il appert par les raisons d’Aristote ou quart de phisique, lesquelles ne conclndent pas que ce soit impossible autrement, si comme il puet apparoir legièrement par ce que dit est.

» Et doncques hors le ciel est une espace vuide incorporèle, d’autre manière que n’est quelconque espace plaine et corporèle ; tout aussi comme la duracion appelée éternité est d’autre manière que n’est duracion temporèle, meisme qui seroit perpétuèle, si comme il appert par ce que est dit devant en cest chapitre.

» Item, ceste espace dessus dicte est infinie et indivisible, et est l’imensité de Dieu, et est Dieu meisme ; aussi comme la duracion de Dieu appelée éternité est infinie et indivisible, et est Dieu meisme, si comme il est dit devant en cest chapitre.

» Item, en cest chapitre est dit devant que nostre pensée ne puet estre sans transmutation ; nous ne povons comprendre